Nous l’avons dit, notre syndicat est confronté à des défis qu’il nous faudra relever tous ensemble pour nous renforcer. Nous : notre outil syndical, notre fédération et notre syndicalisme.
Sous le signe des mobilisations
Ces derniers mois ont été émaillées par de nombreuses mobilisations, mais, il faut bien le reconnaître, c’est un mouvement auto-organisé en dehors des syndicats, les Gilets jaunes, qui a marqué profondément le paysage et a même réussi à arracher quelques miettes, assez conséquentes -de l’ordre de quelques milliards-, à un pouvoir pourtant plus que dogmatique sur sa ligne libérale et autoritaire.
Et, avec les stylos rouges, même notre champ pourtant fortement syndiqué, est confronté à une petite « réplique » des Gilets jaunes. Pas tant une histoire de couleurs mais de démonstration d’une possibilité de contournement de l’outil syndical pour informer, voire coordonner, à large échelle. Plusieurs dizaines de milliers de nos collègues, quelques-uns dans cette salle mais beaucoup ailleurs, les suivent sur les réseaux sociaux. On retrouve, encore plus aboutie, cette forme d’auto-organisation dans les luttes climatiques ou encore, pour partie dans notre mobilisation contre la loi Blanquer, où à côté des journées nationales d’action, fourmillent une multitude d’actions très locales, impliquant notamment les parents d’élèves.
Cette situation inédite acte la fin de la rente de situation où le syndicalisme pouvait ronronner car il était le seul à proposer une information à grande échelle aux salarié-es et à être capable de les organiser. Cela bouscule un syndicalisme en crise aujourd’hui dans sa capacité à mobiliser très largement et à obtenir des avancées. Il s’agit donc pour le syndicalisme de réinterroger sa stratégie et ses pratiques pour inventer de nouveaux répertoires d’action afin de reconquérir sa place centrale de cheville ouvrière du mouvement social.
Redévelopper le lien avec les personnels
Il nous faut tenir compte de cette nouvelle donne pour redynamiser et développer très concrètement nos liens avec les personnels et les syndiqué-es. Engageons par exemple une réflexion approfondie sur des outils numériques pouvant faciliter des prises de décisions davantage « horizontales ». Nous pourrions ainsi reprendre à notre compte des modalités qui font la preuve de leur efficacité dans de nombreuses mobilisations citoyennes.
Sans compter qu’en janvier 2020, c’est à dire demain, la fin programmée d’une bonne partie des compétences des CAP bouleversera ce qui constitue le lien privilégié entre les syndicats et les agents de la Fonction publique. Après une mobilisation décevante pour s’opposer à ce démantèlement, il nous faudra trouver de nouvelles voies pour y résister. Car la forme finale de tout cela n’est pas déterminée, elle peut et doit être l’objet d’une âpre bataille, comme par exemple sur le mouvement départemental bouleversé lui dès cette année par une réforme technocratique. D’un côté il va y avoir la loi, ses décrets et les notes de service et de l’autre la réalité issue des rapports de force que nous construisons tant avec le ministère que localement.
Forts de notre légitimité à agir dans l’intérêt des personnels, nous devrons batailler pied à pied pour maintenir un cadre collectif de gestion des carrières à l’heure où le new management avance à visage découvert dans la Fonction publique.
Et si au final, nous perdons tout de même par ce biais une partie de notre attractivité auprès des personnels nous aurons là un débat stratégique à mener sur la façon de « compenser », en quelque sorte, cette perte. Prendre en compte encore davantage dans notre syndicalisme des questions touchant au métier peut être une piste prometteuse.
Enraciner notre syndicalisme dans la transformation sociale
Enfin sur notre syndicalisme, celui du SNUipp et de la FSU, nous devrons nous emparer concrètement de notre mandat de réunification du syndicalisme de luttes et de transformation sociale. En perspective du congrès fédéral de décembre, quelles initiatives prendre avec les autres organisations syndicales, celles avec qui nous travaillons et mobilisons au quotidien, en termes de rencontres, de débats, d’échanges…pour avancer vers la construction d’un nouvel outil syndical rassemblant tous les salarié-es, des ubérisé-es et des paupérisé-es aux CDisé-es en passant par les fonctionnaires et les contractuel-les ?
Sans oublier ni d’intégrer les enjeux climatiques au quotidien de notre syndicalisme, là ce n’est pas simplement celle du syndicalisme mais notre survie à tous qui se joue, ni de renforcer la FSU ni de lever nos difficultés de double identification, SNUipp et FSU, encore confirmées lors des dernières élections professionnelles. Inverser nos sigles et se dénommer la FSU-SNUipp semblerait une première réponse concrète à ces difficultés.
Toute une série de défis à relever, loin d’être inatteignables mais nécessitant de vraies discussions entre nous.
Sur le terrain de l’école, ces derniers mois ont incontestablement fait de notre syndicat le premier opposant à Blanquer. Ne boudons pas notre plaisir de l’avoir fait reculer sur les EPLESF, même si c’est largement insuffisant et que dans le même mouvement le Sénat a largement amendé la loi de façon plus que régressive.
Nous sommes donc loin d’en avoir terminé. Nous avons la responsabilité de continuer à marteler concrètement notre exigence d’abandon de la loi pour peser sur son écriture finale qui se joue le jour de la commission mixte paritaire. Pour cela, nous ne pouvons pas tergiverser. Nous devons décider au plus vite, très vite, d’un appel national à la grève le plus unitaire possible ce jour-là. Un appel à la grève contre l’ensemble de l’école à Blanquer, sa loi bien évidemment mais aussi sa gestion calamiteuse des personnels incarnée à travers le mouvement. Un appel à la grève convergent avec celui hautement symbolique du second degré le premier jour du bac. Un appel à la grève pour lequel il nous faudra tout mettre en œuvre pour mobiliser les personnels sans attendre car le 13 arrive très vite.
Sans oublier la rentrée.
Car, pour gagner, nous devons faire partager la nécessité et la possibilité d’une autre école que celle de Blanquer. Une autre école démocratique et émancipatrice dont nous avons patiemment élaboré depuis 25 ans le projet.
Convainquons largement nos collègues et les parents que notre projet pour l’école pose de premiers jalons d’une réflexion commune à enrichir tous ensemble par exemple dans le cadre d’états généraux pour une autre école.
Face à l’école du tri social, face à la dérive managériale, face à la volonté de faire de nous des exécutant-es, face au salaire au mérite, face aux dégradations annoncées pour les retraites… nous avons des réponses solides qui n’ont besoin que d’être actualisées.
C’est tout l’enjeu de notre congrès : poser un bilan, débattre, confronter nos analyses, parfois divergentes, pour tracer ensemble via l’alchimie de la synthèse de solides perspectives pour l’avenir.
Nous avons quatre jours pour renforcer le SNUipp, la FSU, l’école et notre projet de transformation sociale.