Depuis bientôt 2 ans, les plus jeunes militant-es d’entre nous, celles et ceux qui n’avaient toujours milité que sous la droite au pouvoir, font l’amère expérience de ce que les plus ancien-nes leur avait raconté : militer syndicalement sous un gouvernement dit de gauche n’est pas chose aisée…
Depuis bientôt 2 ans, celles et ceux qui sont engagé-es dans un syndicalisme visant une transformation sociale, ont été étonné-es (quand même avec l’expérience des années Mitterrand, on ne va pas se faire à nouveau avoir…), incrédules (non mais on s’attend à gagner quoi, sans mobilisation, avec ce gouvernement ?) puis consterné-es (on ne fait rien là ?) par la faiblesse des réponses données par le mouvement social à la poursuite de l’orientation libérale pourtant combattue sous la droite au pouvoir.
Après les « il faut donner le temps au nouveau gouvernement d’engager les réformes » des premiers mois du gouvernement Hollande/Ayrault ; les « attendons les résultats des négociations promises » des mois suivants ; c’est par un « c’est compliqué » que les directions syndicales ont ensuite répondu aux appels à mobilisation des militantEs les plus combattifs-ves.
Dans un contexte de division entre un syndicalisme d’accompagnement et un syndicalisme de transformation sociale – avec en ligne de mire des élections professionnelles à fort enjeu -, organiser le nécessaire front unitaire pour résister aux nouvelles dégradations et peser sur les choix d’un pouvoir à la solde du patronat, est effectivement un peu compliqué.
Mais ce qui est carrément insupportable, c’est :
– l’occupation de la rue par des personnes qui avouent n’y être jamais descendue auparavant, et qui manifestent contre l’égalité des droits de toutes et tous ;
– les reculs du gouvernement devant les mobilisations de bonnets rouges, pigeons et autres volatiles, qui défendent leurs intérêts particuliers, souvent au détriment d’un Tous ensemble des exploité-es ;
– la poursuite des cadeaux fiscaux faits au patronat et leur financement par la population (hausse de la TVA) ;
– le pacte dit de responsabilité signé avec le MEDEF qui ne va pas empêcher les annonces quasi quotidiennes de plan de licenciements mais qui va non seulement poursuivre mais accentuer la politique d’austérité par la réduction des dépenses et dégrader plus encore protection sociale et qualité du service public ;
– la poursuite des expulsions des migrant-es sans papiers ;
– la répression sévère et orchestrée par le ministère de l’intérieur de la manifestation contre l’aéroport de Notre Dame des Landes le 22 février ;
– l’audience que trouvent dans la population et y compris chez des militant-es syndicaux, les thèses du Front National comme solutions possibles à la crise économique et sociale…
Les organisations syndicales de transformation sociale ont la responsabilité de porter auprès des salarié-es, les alternatives qui existent aux politiques libérales, ce qu’elles font tant bien que mal. Mais elles ont aussi la responsabilité de construire le rapport de force qui permettra d’imposer ces alternatives. Les revendications unifiantes, rassemblant salarié-es du public et du privé, sont une condition nécessaire à la participation du plus grand nombre aux mobilisations. Plus largement, favoriser la conscience et la solidarité de classe par des journées d’actions revendiquant un autre partage des richesses, permettra de lutter contre le repli sur soi et favorisera la construction d’un large mouvement social à la hauteur des enjeux.
Au moment où sont écrites ces lignes, la journée de grèves et de manifestations interprofessionnelles du 18 mars est à venir. Elle s’inscrit pour nous dans cette optique… Faisons en sorte qu’elle ait des suites rapides.
Valérie Soumaille