Sous le matraquage économique de la Troika, la Grèce est en proie à une catastrophe sociale sans précédent
qui fait sombrer l’ensemble de la population dans la misère. Non contents de cela,
les tenants de l’ordre économique dominant entendent aussi dénier aux Grecs le droit d’exprimer leur colère.
Comme en Grèce les repas du “midi” sont souvent pris au retour des cours, vers 15 heures, les établissements scolaires accueillent une sorte de cantine où nombre d’élèves achètent des sandwichs en fin de matinée. Ces cantines sont réunies en une Fédération nationale qui vient d’annoncer une chute de 40 à 60 % des recettes. Elle a donc décidé de distribuer chaque jour des mini-repas gratuits pour 2500 enfants, le ministère de l’éducation faisant la même chose pour une dizaine d’écoles de la région attique. Il est devenu fréquent de voir s’évanouir en classe des élèves dont les parents ne peuvent plus payer le casse-croûte de midi.
Etat de catastrophe sociale
S’ajoute à cette misère celle de l’éducation en général : fusion d’écoles, baisse des rémunérations des enseignants, comme pour tous les salariés, jusqu’à 40 % en deux ans, remise en cause des contrats des enseignants des cours privés, très nombreux en Grèce en raison de la course au classement pour l’université.
L’éducation est plongée dans la même situation terrible que tous les secteurs sociaux du pays et il est insupportable d’entendre les responsables politiques aux ordres de la « troïka » (FMI, commission et Banque centrale européennes) comme les medias dominants menacer les Grecs d’une catastrophe si par malheur ils donnaient la majorité à la gauche radicale.
Car la catastrophe, elle est déjà vécue au quotidien : en effet, les hôpitaux, désorganisés par des fusions, manquent désormais de médicaments et même de matériel d’entretien de base, car ils ne peuvent pas payer. Il y a une semaine, il a fallu une campagne de colère d’une association de malades pour que le gouvernement fasse assurer la délivrance de soins aux malades du cancer. De leur côté, les pharmaciens, asphyxiés par le non remboursement des médicaments par les caisses de sécu, en restreignent la délivrance, et, pour certains, font faillite. Médecins du Monde, qui jusqu’à récemment soignait quasi exclusivement les immigrés, accueille désormais de très nombreux Grecs dans ses permanences, y compris pour de la nourriture. Le nombre croissant de jeunes veulant quitter le pays, ou la sinistre explosion du nombre de suicides, autant de faits qui disent que la catastrophe, on est en plein dedans !
Démocratie piétinée
Face à la confiscation de la souveraineté politique du pays, beaucoup comprennent aujourd’hui que la politique de terreur économique menée par les différentes institutions du capital a une valeur d’exemple pour tous les peuples européens et même au-delà ! Cette politique impose la loi des banquiers, casse totalement non seulement les acquis mais aussi la façade démocratique dont l’histoire moderne de la Grèce montre qu’elle n’a jamais été un souci majeur pour la droite et pour ses alliés internationaux. En même temps, c’est sous une majorité Pasok (PS grec) que le mouvement d’extrême-droite Laos est entré à l’autome 2011 dans un gouvernement « d’union nationale »… de défense du memorandum et des mesures d’austérité. Et aujourd’hui, aucune mesure légale n’est prise contre le groupuscule nazi « Chryssi Avgi » dont la moindre action devrait déclencher l’interdiction.
Une alternative à gauche
Les Etats européens exercent un chantage éhonté, pour éviter que les élections du 17 juin confirment la belle surprise du 6 mai : la possibilité qu’un peuple porte au pouvoir un parti de la gauche radicale, ce qui aurait bien sûr une sacrée valeur d’exemple ! A l’évidence, Syriza a su offrir une perspective crédible aux centaines de milliers de manifestant-e-s qui se sont opposés dans la rue aux mesures du printemps 2010 : appeler à un gouvernement unitaire de la gauche (hors Pasok !) pour abroger tout le dispositif d’austérité et instaurer une politique favorable aux travailleurs. La polarisation ressortant des actuels sondages entre la droite et Syriza montre que si celle-ci arrive en tête le 17 juin, face à l’agressivité des bourgeoisies européennes, il faut construire une solidarité massive et durable du monde du travail et de la jeunesse à l’échelle de l’Europe. Car comme le rappelle la gauche anticapitaliste Antarsia, la lutte ici est plus que jamais aujourd’hui pour le pain, l’éducation, la liberté ! ●
Correspondant Ecole Emancipée,
Athènes, le 10 juin 2012