Rares sont celles et ceux qui ne considèrent pas que féminiser nos instances est aujourd’hui une nécessité pour le syndicat. La contribution de responsables UA pour le congrès FSU, par son existence même est significative. Nos professions sont en grande majorité féminine. L’étude menée à l’initiative du SNES par une sociologue et une ergonome montre que le fait d’être une femme constitue une entrave à la progression de carrière, ce qui doit nous conduire à des revendications spécifiques. Les adhérent-es du syndicat sont majoritairement des femmes. Souvent les secrétaires de S1 le sont aussi. C’est au niveau des secrétariats départementaux, des CA Académiques, des secrétariats académiques et de la CA Nationale que la différence se forme. Le syndicat est féminisé, nos instances ne le sont pas.
L’objectif est donc partagé. Le congrès de Marseille l’a montré en adoptant la modification statutaire proposée par l’Ecole Emancipée qui affirme que les instances du SNES doivent tendre vers la parité. Reste à s’en donner les moyens. Bien sûr les textes de congrès reprennent tous les deux ans les mêmes préconisations : faire en sorte que les réunions soient plus accessibles, permettre de concilier vie personnelle et familiale et vie militante (congrès de Reims). Rembourser les frais de garde d’enfants, favoriser des rythmes militants moins contraignants, tout cela est nécessaire mais semble parfois proche de vœux pieux et surtout les évolutions sont trop lentes, finalement rien ne change vraiment.
La seule façon d’avancer dans la bonne direction est de mettre en place quelques éléments contraignants. La contribution de Rouen pointe deux problèmes aux demi-mesures actuelles : « le prix de cette parité imposée est que ce sont toujours les mêmes militantes qui sont appelées partout, sans bénéficier parfois de la même formation qu’un militant homme. Ceci amène même un sentiment d’illégitimité. Sont-elles là pour leurs qualités propres ou pour leur sexe ? » Mais outre le fait que la question de la légitimité effleure rarement les hommes, ces problèmes sont justement liés au fait que nous ne sommes pas dans la contrainte collective mais dans celle de l’individu, d’où naît la culpabilisation des femmes.
Les femmes ne sont pas, par nature, moins capables de prendre des responsabilités que les hommes. Si elles ont ce sentiment c’est que bien souvent elles se sentent isolées du simple fait que, justement, l’appareil syndical n’est pas féminisé. Le préalable c’est donc de changer l’organisation. Puisque toute organisation tend à se reproduire à son image, pour changer l’organisation il faut imposer la présence de femmes. C’est pourquoi l’Ecole Emancipée fait une nouvelle proposition de modification statutaire : faire en sorte que les listes pour les CAA et CAN comportent au moins autant de femmes que d’hommes. Nous sommes capables de le faire pour les élections professionnelles, comment en serions-nous incapables pour des élections internes ? Si les listes sont paritaires, les élues deviendront plus nombreuses. Et s’il y a plus de femmes élues, plus de femmes prenant des responsabilités, elles montreront à l’ensemble des syndiquées que c’est possible, qu’il y a de la place pour elles aussi. Ce qu’une porte-parole ne peut pas faire seule, la présence de femmes à tous les niveaux de l’organisation le fera.
Il est temps maintenant d’oser la féminisation !
Elisabeth Hervouet (Créteil)