Trump, Bolsonaro… Macron… Malgré la faillite éclatante de l’administration libérale du système de santé, les gouvernements du monde capitaliste, fragilisés par leurs gestions de la crise, tentent d’accélérer leurs réformes. C’est le cas en France, où le monde d’avant (le gouvernement et le MEDEF) est à l’offensive pour poursuivre ses attaques sur les droits sociaux, les libertés individuelles et aggraver les conditions d’exploitation des salarié·es. Ce qui rend le pouvoir de plus en plus impopulaire (73 % des français·es souhaitent un changement de politique selon un sondage Odoxa publié le jeudi 4 juin). Les manifestations se multiplient alors qu’elles sont encore interdites et remettent sur le devant de la scène des sujets tels celui de l’accueil des migrant·es (manifestations du 31 mai), celui des violences policières et du racisme systémique dans la police (très nombreuses manifestations dans le monde depuis le meurtre de George Floyd), celui du service public hospitalier (rassemblements tous les mardis devant certains hôpitaux et journée d’action du 16 juin), et enfin celui de l’emploi et des fermetures d’usines (le 30 mai à Maubeuge ou le 3 juin à Choisy-le-Roi, les salarié·es d’usines Renault en grève ont organisé des manifestations très réussies). En cette fin de printemps, la colère sociale est palpable, et forte. Il s’agit d’une opportunité à saisir : reprenons la rue, reprenons la main !
Aux violences et au racisme systémiques dans la police, à la répression, à l’état d’urgence, et à la prétendue « union sacrée », nous opposons les droits, les libertés, et la démocratie !
Un mouvement de révolte s’est levé aux Etats-Unis et dans le monde entier à la suite de l’assassinat de George Floyd par un policier. L’indignation a mobilisé des milliers de personnes et notamment de jeunes racialisé·es qui ne supportent plus les violences policières et le racisme qui ont cours chaque jour dans les quartiers populaires. Peu importent les opinions personnelles des agents de police, le système d’oppression et les missions de la police amènent ses agent·es à avoir des pratiques discriminatoires à effets racistes. De plus, le fait que la plupart des plaintes et des enquêtes pour violences policières n’aboutissent pas montre qu’il s’agit d’un problème institutionnel et non d’individu. Rarement l’audience médiatique de ces mobilisations a été aussi importante. Le SNES et la FSU doivent appeler à rejoindre les manifestations initiées par le comité Adama et les autres organisations de victimes de racisme, et travailler au long cours avec ces associations contre le racisme et la violence policière.
Une organisation de transformation sociale comme le SNES-FSU se doit de donner l’exemple : la place des personnes racialisées, des femmes, des jeunes dans son collectif militant doit être à l’image de la société. Celle des représentant·es du pluralisme ne doit pas être un supplément d’âme.
Le gouvernement profite de la crise sanitaire pour porter atteinte aux libertés individuelles et collectives. L’application Stop COVID est un outil de traçage inacceptable. Le droit à manifester est bafoué par l’état d’urgence sanitaire et le décret du 31 mai qui interdit les rassemblements de plus de dix personnes. Le référé liberté déposé, et gagné, à l’initiative du syndicat des avocat·es de France, avec la FSU, la CGT et Solidaires est une bonne chose. Il faut maintenir la pression pour briser les carcans répressifs, qu’ils soient institutionnels ou policiers.
La plainte déposée par Olivier Sillam contre X pour “violences par personne dépositaire de l’autorité” suite à l’interpellation extrêmement violente qu’il a subie le 9 mai 2019 a été classée depuis le 7 janvier. Le SNES-FSU doit s’exprimer et demander à ce que le dossier soit réétudié.
Le SNES et la FSU continuent à soutenir les collègues victimes de répression syndicale, comme les collègues du lycée Desfontaines de Melle qui se battent contre la réforme du lycée. Le SNES-FSU appelle à l’arrêt immédiat des poursuites et leur rétablissement de plein droit dans leur établissement.
Contre l’austérité et les cadeaux aux grands patrons, nous réclamons plus de services publics, des augmentations de salaires et un “jour d’après” résolument écologiste et féministe !
La crise sanitaire a gelé l’économie mondiale. L’OCDE prévoit une baisse entre 11 et 14% du PIB français pour cette année. Cette crise économique renforce la crise sociale : disparition de 450 000 emplois depuis le début de la pandémie, explosion du chômage, plans de licenciements ainsi que fermetures d’entreprises à craindre.
Ne comptons pas sur le gouvernement français pour améliorer la situation. Il vole au secours du monde d’avant : les exonérations fiscales ont plu pendant le confinement, 15 milliards d’euros sont promis au secteur de l’aéronautique, 7 milliards prêtés à Air France sans contre partie, faisant fi de toute considération écologique. Le gouvernement ne change pas de cap et en profite pour poursuivre sa politique contre les droits des travailleurs·ses : remise sur le tapis de la réforme des retraites, chantage aux baisses de salaires dans les entreprises (conséquence de la “Loi travail”), attaques sur les congés payés, les jours fériés et le temps de travail (conséquence de la loi de transformation de la Fonction Publique).
La crise a pourtant montré ce qui devrait être une priorité de notre société : le développement des services publics et la consolidation des mécanismes de solidarité. A ce titre, les promesses d’une revalorisation “significative”, l’hommage lors du défilé du 14 juillet et la remise de médailles sont vécus comme des provocations par les personnels de santé. L’indécence de ces choix rend nécessaire une réponse forte du mouvement social pour montrer que d’autres choix sont possibles. La réussite de la journée du 16 juin pour l’hôpital doit donner lieu à d’autres perspectives à construire, à commencer par celle du 30 juin. La place de la FSU dans les services publics lui donne une responsabilité particulière.
L’arc des forces qui composent les signataires de l’appel “Le jour d’après” constitue un véritable bol d’air dans ce contexte. Il permet de faire connaître et de fédérer autour de propositions réellement alternatives pour une sortie de la crise du néolibéralisme. Il s’agit de poursuivre cette belle dynamique en la faisant désormais vivre localement (à travers des collectifs de ville notamment) et en impliquant plus largement la population. C’est à cette condition que cet appel ne sera pas “un appel de plus”. Le SNES et la FSU prennent également part aux collectifs qui se créent pour lutter contre l’implantation des GAFAM qui suppriment des emplois locaux (contre l’ouverture d’entrepôts Amazon par exemple).
Dans les camps de réfugié·es, les hôpitaux ou centres de soin, les écoles, les supermarchés, et bien sûr à la maison, les femmes ont été en 1ère ligne pendant cette crise. Dans cette situation inédite de confinement, rien de ce que vivent les femmes au quotidien ne leur a été épargné, les inégalités, les violences du patriarcat et du libéralisme se sont accrues. En accentuant les inégalités et les discriminations sexistes préexistantes, la pandémie a aussi fait disparaître les femmes de la sphère publique (même les « soignantes » sont devenus des « soignants »). Elle a donc abouti à une aggravation de la situation des femmes, plus que jamais enfermées. Après les très fortes mobilisations du 25 novembre et du 8 mars, il est de notre responsabilité de construire des mobilisations et des luttes encore plus grandes pour défendre les droits des femmes et arriver à l’égalité.
Dans l’Éducation, contre l’éclatement des cadres collectifs, contre le contrôle hiérarchique et la dégradation des conditions de travail et d’étude, le SNES-FSU revendique un plan d’urgence visant la démocratisation scolaire au lieu de l’école Blanquer à plusieurs vitesses !
Blanquer a géré la crise de manière catastrophique : pendant le confinement, ses annonces ont été le plus souvent contre-dites par le premier ministre, il n’a eu de cesse d’accentuer la pression sur les enseignant·es, les élèves et les familles autour de sa prétendue “continuité pédagogique”. Le SNES-FSU rappelle que l’enseignement à distance, même avec du haut débit, du matériel informatique adapté, n’est pas et ne sera pas l’école : le groupe-classe et les interactions sont des éléments essentiels dans l’apprentissage et l’action pédagogique n’est pas une juxtaposition d’interventions individuelles. L’école joue un rôle fondamental dans la socialisation des jeunes et dans leur développement.
Cette école du “tout numérique” a été un moyen pour l’administration de bien souvent contourner les obligations réglementaires de service pour en demander toujours plus aux personnels, augmentant les risques psycho-sociaux. Les collègues sortent de cette séquence épuisé·es, nombreux-ses sont au bord du burn-out. Le SNES-FSU revendique, dans le cadre d’un enseignement “distanciel” même en partie seulement, qui doit être cantonné aux situations très exceptionnelles telle que celle que nous venons de vivre, un cadrage des outils numériques utilisés, le respect de liberté pédagogique, du temps de service… Le SNES-FSU doit par ailleurs obtenir la prise en charge du financement de l’intégralité des outils de travail, y compris personnels, pour les équipes éducatives des établissements.
La réouverture des écoles et établissements ne se déroule pas mieux : dans les collèges et les lycées, on a assisté à une désorganisation totale des services et des enseignements, sous prétexte que le protocole sanitaire empêcherait la cohérence pédagogique. Le lien difficilement entretenu par les enseignant·es avec leurs élèves a parfois été paradoxalement brisé à l’occasion de cette réouverture, puisque les élèves n’ont pas toujours été pris·es en charge par leurs enseignant·es sommé·es de faire de l’accompagnement au travail à distance donné par d’autres enseignant·es. La situation est difficile pour les enseignant·es, mais aussi pour les agent·es et les personnels des vies scolaires. Les annonces d’E. Macron le 14 juin, notamment celles concernant le retour de “tous les élèves, de manière obligatoire et selon les règles de présence normale” sans la moindre concertation avec les personnels, est une nouvelle mise sous tension des équipes. Le protocole a été vidé de sa substance ce qui pose des problèmes importants, notamment dans les zones où le virus circule encore beaucoup. Le SNES-FSU revendique que les communautés éducatives soient toujours informées des cas de contamination dans les établissements, et qu’une politique de tests sanguins et PCR y soit mise en oeuvre systématiquement.
La séquence a mis au jour et accentué les inégalités sociales et scolaires. Le SNES-FSU dénonce la politique éducative de Blanquer, dont les discours sur les “décrocheurs” et la volonté affichée de “faire revenir les élèves les plus éloigné·es de l’école” sont le cache-sexe de réformes aggravant les inégalités. Elle est sous-tendue par une idéologie qui conçoit la réussite ou l’échec scolaire comme une responsabilité individuelle et qui vise à en finir avec l’élévation du niveau moyen de connaissances. Les “vacances apprenantes” et les “stages” de soutien scolaire gratuits en juillet et août obéissent à cette logique, que le SNES-FSU dénonce : le soutien scolaire n’est efficace que lorsqu’il est conduit dans le quotidien de la classe, grâce à l’étayage individuel et collectif de l’enseignant·e pensé en relation étroite avec la progression des apprentissages.
La préparation de la rentrée de septembre est très inquiétante. Le camp néolibéral en profite pour avancer ses idées, par exemple autour de la nécessaire adaptation des programmes : “compétences” (de préférence comportementales contre savoirs émancipateurs), “cycles” (pour mieux individualiser les parcours), “fondamentaux” (dans une vision la plus réductionniste possible) sont les mots martelés par Max Brison (LR) ou par Blanquer. Le numérique a pris une place très importante et l’école est la proie de l’appétit renouvelé des GAFAM. Les corps d’inspection préparent le terrain pour “accompagner” les enseignant·es dans la recherche des « leviers qui [leur] apparaissent essentiels dans la mise en place d’un enseignement qui hybride le distanciel et le présentiel » (comme l’écrivent des IPR de l’académie de Strasbourg). Les pseudo consultations proposées par Blanquer doivent être l’occasion de porter à nouveau nos revendications et projet d’école auprès des médias et du MEN.
On voit là se dessiner un projet cohérent d’école, mais un projet qui est à l’opposé de celui du SNES-FSU. La salve politique et médiatique contre les enseignant·es, qui surfe sur le fait que les enfants sont finalement très peu accueilli·es dans les écoles et les établissements, est une attaque supplémentaire contre l’école. Cette campagne de presse diffamante, et orchestrée, sur les “nombreux profs décrocheurs” sera combattue fermement. Le SNES-FSU mènera campagne avec la FSU sur son projet pour l’école en général et le second degré en particulier, contre le projet réactionnaire de Blanquer dénoncé y compris par de hauts fonctionnaires, dans la tribune “Nous ne pouvons plus nous taire”.
Plan d’urgence du SNES-FSU pour l’Education
1. Suspension immédiate des réformes engagées par Blanquer avant la crise sanitaire (bac, lycées, accès au supérieur, recrutement et formation des enseignant·es pour notre champ, mais aussi enseignement professionnel, Loi de Programmation Pluriannuelle de la Recherche…), et celles qu’il a réintroduites à bas bruit pendant la crise après avoir été obligé de reculer en raison de mobilisations (examens en contrôle continu, direction d’école, externalisation de certains enseignements par les 2S2C…). Le SNES-FSU ne se reconnaît pas dans la prétendue “grande consultation” engagée par Blanquer et réclame la démission du ministre.
2. Ce n’est pas le protocole sanitaire qui empêche par lui-même d’accueillir tou·tes les élèves, ni le fait que quelques enseignant·es à risques ne puissent pas reprendre : ce sont les moyens qui manquent ! Les locaux ne sont pas assez spacieux, les personnels (d’enseignement, d’éducation, d’entretien et d’accueil) pas assez nombreux, pour permettre d’accueillir simultanément tou·tes les élèves, a fortiori dans des groupes de 10 à 15. Dès que la situation sanitaire le permettra, le SNES-FSU revendique un retour à la normale des emplois du temps des élèves et des enseignant·es, avec des moyens supplémentaires permettant de prendre les élèves en groupes allégés dans le cadre des enseignements disciplinaires (rappelons que l’AP en collège comme en lycée est loin de remplir toujours cet office et que ces heures ont été prises sur les horaires disciplinaires : elles doivent leur être rendues). Ces heures d’enseignement ne devront pas être financées en heures supplémentaires, déjà trop nombreuses dans les établissements, mais par un plan de titularisation de toutes et tous les non-titulaires. A plus long terme, le nombre de postes ouverts aux concours doit être abondé.
3. Si la situation sanitaire ne permet pas un retour à la normale dès la rentrée de septembre, le SNES-FSU revendique la réaffirmation de l’obligation scolaire : toutes et tous les élèves ont besoin d’aller à l’école et doivent y aller. Dans cette mesure, le “distanciel” n’a plus lieu d’être, et les enseignant·es doivent être libéré·es de ce travail colossal mais globalement bien moins efficace sur les apprentissages des élèves, afin de se consacrer aux nécessaires adaptations didactiques et pédagogiques des enseignements dans un format présentiel dégradé. Ce qu’il a été à la rigueur possible de faire pendant le confinement et ensuite à la réouverture des établissements l’a été uniquement parce que les enseignant·es connaissaient leurs élèves (leur situation personnelle et scolaire, leurs besoins). Cela sera impossible en début d’année, quand la relation pédagogique n’est pas encore construite. Le SNES-FSU revendique que les élèves puissent être pris·es en charge dans leur groupe-classe d’origine, par leurs enseignant·es, pour recevoir des enseignements disciplinaires (et non pour faire de l’aide aux devoirs). Du côté des enseignant·es, cela implique le respect des ORS (avec décharge et limites horaires si une partie de l’enseignement doit se poursuivre à distance) et du VS.
4. Quelle que soit la situation sanitaire, le SNES-FSU revendique le recrutement d’AED, ainsi que d’agent·es d’entretien et d’accueil supplémentaires, pour assurer la santé et la sécurité des personnels et des usager·es dans les établissements, dès la rentrée de septembre. Du temps de concertation inclus dans les services (3 heures pour les certifié·es et les agrégé·es) est également une nécessité car le suivi des élèves va réclamer une prise en charge étroite et concertée, en équipe pluri-catégorielle.
5. Il est inenvisageable de commencer l’année par des révisions, extrêmement ennuyeuses et stigmatisantes pour des élèves qui se sont senti·es à la fois investi·es dans le distanciel et laissé·es pour compte par un mode d’enseignement discriminant. Les programmes d’enseignement et d’examens doivent être aménagés sur plusieurs années. Le SNES-FSU est attaché aux programmes nationaux annuels car ils fixent un horizon commun à toutes et tous, enseignant·es, élèves, familles. A plus long terme, le SNES-FSU revendique leur remise à plat au profit de savoirs émancipateurs (et par savoirs, nous entendons également les savoirs opérationnels, ou “savoirs-faire”, “méthodes”, “compétences”), à rebours de l’école du socle qui justifie actuellement un grand nombre de dégradations et de déréglementations.
6. Ce plan d’urgence ne sera pas complet s’il n’inclut pas la question de la formation des enseignant·es : le SNES-FSU combat la politique de Blanquer en la matière (arrêté master, nouveaux concours, nouvelle architecture de la formation), puisqu’au lieu de former des enseignant·es concepteur·trices capables de relever le défi de la démocratisation scolaire, les réformes engagées visent à accentuer le poids de l’employeur dans la formation et le recrutement pour faire des enseignant·es qui appliqueront les “méthodes pédagogiques” promues par le ministère et les corps d’inspection. Le SNES-FSU travaille avec les autres syndicats de la FSU à la construction d’une riposte et d’une alternative fédérale à la hauteur.
7. Enfin, les personnels de direction et les corps d’inspection ont démontré durant toute cette séquence leur inutilité, voire le caractère néfaste de leur action (surveillance à distance, pressions et injonctions paradoxales porteuses de risques psycho-sociaux, désorganisation totale des services et des enseignements, non respect du protocole sanitaire ou du droit à la déconnexion…). L’importation de ces méthodes néo-managériales dans le premier degré à travers la création d’une mission ou d’un statut (peu importe comment on l’appelle) de directeur·trice d’école est à l’inverse de ce qu’il faut transformer pour construire l’École de demain. Le SNES-FSU engage une réflexion fédérale au sujet des hiérarchies intermédiaires et réclame un moratoire sur le statut et les missions de ces personnels dans la perspective de leur refonte totale au profit des collectifs de travail. Il est temps, à défaut de leur suppression immédiate, d’exiger une refonte totale de leur formation et de leurs missions qui doivent être plus tournées vers la gestion du collectif que vers les injonctions, vers l’horizontalité que vers la verticalité.
Le SNES-FSU contactera les fédérations de parents d’élèves et les organisations lycéennes, travaillera dans le cadre fédéral, et recherchera des alliances avec les autres organisations syndicales de son secteur pour porter le plus largement possible ces revendications, et mettre en débat des perspectives de mobilisations y compris par la grève.
Documents joints