Le droit fondamental de manifester est une forme de concrétisation d’autres libertés, dont les libertés d’expression, de pensée, de conscience, ou encore d’association. Ce droit fait l’objet d’une reconnaissance ferme et généralisée en droit international.
Or, ce droit est attaqué notamment depuis 2015 avec une accentuation depuis 2017. S’il n’est pas explicitement remis en cause, on assiste à une multiplication des contraintes et restrictions visant à dissuader de se rendre dans une manifestation. Ces pratiques sont autorisées par un état d’exception qui tend à devenir la norme.
Darmanin développe un lexique de surenchère et d’amalgame, qualifiant les manifestant-es, fussent-il à l’origine de violences, de « voyous, bandits » ou même « assassins ». Se faisant, il participe à la dévalorisation globale de ce mode d’action démocratique qu’est la manifestation tout en cherchant à légitimer les violences policières.
La manifestation du 12 décembre 2020 à Paris est emblématique de cette dérive autoritaire de l’État et d’une forme de manipulation de l’opinion. Les manifestant-es ont subis 32 charges de police, justifiées d’après Darmanin par la présence d’individus ultra-violents. Outre le fait que les images de la manifestation démontrent le contraire, la police a procédé à 142 interpellations. Si 5 manifestant-es ont été condamné-es, dont deux pour « fait de violence » il y en a eu 113 personnes arrêtées sans motif légitime du point de vue de la justice. Dans le détail, 18 n’ont même pas été mises en garde à vue tandis que 49 ont fait l’objet d’un classement sans suite et 46 d’un simple rappel à la loi.
On voit là le caractère volontairement disproportionné de la répression et la marque du préfet Lallement dans la gestion des manifestations parisiennes. Mais si Paris est le théâtre le plus marqué de ces pratiques, la capitale n’en a pas l’exclusivité. C’est donc une tendance nationale, choisie par l’exécutif, couverte par le ministre de l’intérieur.
C’est dans ce contexte que le Conseil d’État vient de rejeter le référé de la CGT, de FO et de la FSU sur les 3 décrets de fichages de Darmanin et de donner un avis favorable à ces mêmes décrets qui élargissent les possibilités de fichage, autorisant policiers et gendarmes à faire mention des « opinions politiques », des « convictions philosophiques et religieuses », et de « l’appartenance syndicale » de leurs cibles, alors que les précédents textes se limitaient à recenser des « activités ».
Le SNUipp FSU se doit d’informer, de sensibiliser les collègues sur la thématique des droits et des libertés, individuelles et collectives. Ce n’est pas un supplément d’âme mais une tache syndicale importante, un impératif pour tous les hommes et les femmes attaché-es à la liberté. C’est aussi pour cela qui faudra être dans la rue les 16 et 30 janvier.
Jean-Philippe Gadier