Malgré sa vie un brin monotone en apparence, M. Félix a l’air heureux dans sa maison remplie d’affiches encadrées qui représentent certaines de ses œuvres dont l’utilité et la pertinence sont, dit-on, unanimement plébiscitées. Qu’on en juge plutôt : M. Félix est l’inventeur d’« outils à doigts pour bricoleurs adroits », d’un « casse-noix de coco » ou encore du « bonjour madame » qui permet à son heureux utilisateur de lever son chapeau sans bouger la main…
M. Félix va toutefois se heurter aux limites de son génie inventif quand il lui faudra répondre à la demande d’un homme riche et puissant. Les motifs de son costume vert rappellent bizarrement ceux que l’on trouve sur les dollars et tranchent avec les lignes simples et rassurantes de l’appartement rangé de l’inventeur. L’homme en vert a chargé M. Félix de lui inventer une « machine à rendre les millionnaires milliardaires ». L’inventeur a beau se creuser la cervelle, il ne trouve rien.
M. Félix se sortira de ce mauvais pas par une invention bien astucieuse qui aura comme seul effet de faire patienter éternellement le millionnaire trop sûr de son fait.
Une bien belle parabole qui permet de s’interroger simplement sur de nombreuses questions. L’accumulation sans fin de richesses qui est la demande de l’homme en vert est-elle possible, voire souhaitable ? Peut-elle être le seul objectif de l’inventivité humaine ? La soumission de la recherche au profit n’est-elle pas un frein ? D’importantes questions en réalité évoquées de manière très drôle et plaisante dans un album aux illustrations fines et belles. [*Jean-François Martin, L’inventeur, Ed. Thierry Magnier.*]