Good COP, Bad COP
« Si ce n’est pas maintenant, alors ce sera quand ? » demandaient les manifestant·es de Glasgow en marge de la COP 26. Qualifié de « festival du greenwashing » par Greta Thunberg, la conférence de Glasgow illustre l’absence de volonté des secteurs capitalistes dominants à adopter les décisions pour répondre à
l’urgence et aux défis liés au changement climatique qui impacte davantage les pays les pauvres mais aussi à rompre avec un système capitaliste productiviste lancé à vive allure vers un écocide.
Alors que la société civile prend conscience des enjeux posés par la crise climatique le monde ne cesse d’émettre toujours plus de gaz à effet de serre. La course aux profits immédiats est la caractéristiques des puissants. Les records absolus atteints par le CAC 40 en sont la parfaite illustration.
On ne peut pas s’en prendre conséquemment à la crise climatique sans s’attaquer radicalement aux inégalités. Au niveau mondial, 10 % de la population mondiale est responsable de 50 % de l’émission des gaz à effet de serre. Mais au-delà de la fracture nord-sud, il y a une profonde fracture sociale dans les pays riches eux-mêmes. En France par exemple, la moitié la plus pauvre de la population émet environ 5 tonnes tandis que 10 % des plus riches émettent 25 tonnes de GES.
Taxer les riches est une voie incontournable pour mettre en place un système d’accompagnement et de compensation pour les plus fragiles. Mais aussi revoir les finalités et le sens du travail, sortir de la doctrine que la croissance et le PIB sont des solutions alors qu’ils ne sont que des indicateurs, promouvoir la coopération et la satisfaction des besoins sociaux. Le syndicalisme doit s’emparer de ces problématiques, de la défense des intérêts matériels et moraux de la population à l’aune des défis de ce début de XXIème siècle.
En attendant…
En attendant, le vieux monde libéral poursuit son entreprise de destruction des services publics, de la protection sociale, des statuts et du droit du travail. Il ne faudra pas compter sur celles et ceux qui le défendent pour s’arrêter en dehors d’un rapport de force social et politique.
Le gouvernement Macron est l’incarnation de cette orientation libérale, en continuant à fermer les lits d’hôpitaux en pleine crise sanitaire (13 000 cette année), ne créant pas un seul poste dans le 1er degré et en supprimant dans le secondaire. En attendant, 12 millions de personnes sont confrontées à la précarité énergétique et au mal logement.
En attendant, 9,3 millions de personnes restent sous le seuil de pauvreté et la gestion libérale de la crise a exacerbé les difficultés des plus précaires. En attendant, le CAC 40 a passé les 7 000 points le vendredi 5 novembre après une hausse de plus de 25 % depuis le début de 2021.
L’horizon que tracent Macron, LR, les sociaux libéraux est à contre sens des solidarités sociales nécessaires, donnant toujours plus de pouvoir aux premiers responsables de la montée des inégalités et organisant la destruction des services publics, leviers indispensables d’une politique publique durable, juste et égalitaire.
Se battre au présent,
Solidarité, justice sociale, protection des plus faibles, coopération et mise en avant du collectif, les valeurs fondatrices du syndicalisme doivent être défendues face à l’atomisation de la société et ses replis individualistes. Dans notre champ, éprouver le collectif, ressentir ce qu’il peut apporter, alimenter la réflexion et la pensée critique des personnels est une tâche indispensable et qui fait du bien et participe à la conscientisation de la profession, comme en a témoigné Laurence de Cock lors des dernières Université d’Automne du SNUipp-FSU.
Éprouver le collectif, c’est aussi lutter ensemble, comme dans les écoles de Marseille. C’est grâce à la présence, la combativité et l’opiniâtreté des militant·es du SNUipp-FSU que les grandes annonces de Macron sont refusées par la grande majorité de la profession. Cela ne se produit pas spontanément. Cela repose sur des équipes militantes et leur capacité collective de penser et d’agir, d’entraîner dans leur sillage les personnels pour résister et pour lutter.
C’est aussi, comme les AESH, porter dans le temps des revendications justes avec le soutien de l’ensemble des personnels, qui ont pour effet, parce qu’elles sont reprises largement et qu’elles ne se seront levées qu’après avoir obtenu satisfaction, d’isoler Blanquer et de lui faire porter la responsabilité d’un insupportable statu quo. Il est nécessaire aujourd’hui d’amplifier la mobilisation en cherchant les soutiens – y compris parlementaires – pouvant influer sur les choix actuels, et de renforcer sa dimension nationale.
C’est aussi participer aux luttes sociétales affirmant les valeurs d’égalité et de solidarité comme celles contre les violences sexistes et sexuelles les 20 et 25 novembre ou agir en soutien aux réfugié·es et aux migrant·es.
Lutter contre les précarités
Aujourd’hui la part des agent·es de l’Education nationale sous contrat précaire augmente. La lutte contre la précarité est un combat majeur : elle se justifie par la défense des intérêts immédiats des personnels et par la défense de statuts et de rémunérations compatibles avec un service public de qualité pour la population. Ce développement organisé de la précarité et la dévalorisation des salaires sont les marques de la gestion néo libérale dans les services publics (Nouveau Management Public).
Cette politique place à terme les agent·es dans l’incapacité d’accomplir leur mission du fait des contingences de leurs emplois, des bas salaires ou des pressions qui s’exercent. Les difficultés de recrutement dans l’hospitalière ou dans l’éducation sont le résultat de ces politiques et se transforment en justification du recours de plus en plus systématique à des contrats précaires. La lutte contre l’avènement d’une Fonction publique précarisée doit être un axe majeur dans la défense des personnels et du service public.
Penser le futur
Le syndicalisme doit contribuer à construire l’émancipation sociale face aux conséquences du système capitaliste. Cela est d’autant plus vital que depuis des décennies maintenant, l’extrême droite prospère sur la désespérance sociale.
Si le milieu enseignant reste relativement préservé des idées de l’extrême droite, il n’en est pas pour autant exempt. Notre syndicalisme doit donc développer une argumentation constante sur les dangers que l’extrême droite fait courir à nos libertés et nos conquis sociaux. Ce travail doit être mené à la fois pour les salarié·es de notre champ de syndicalisation, et plus largement dans la société. Il y a une nécessité à faire de cette question un élément essentiel de notre syndicalisme, et donc de notre culture professionnelle. La récente Une du Figaro Magazine posant l’antiracisme et l’éducation à l’égalité à l’école comme un endoctrinement des enfants dit tout de la bascule à l’œuvre d’une partie des classes dirigeantes. Le silence de Blanquer est assourdissant, mais pas surprenant.
Penser le futur, c’est le mettre en débat avec nos collègues, notamment à travers les propositions du collectif « Plus jamais ça » dont la FSU est partie prenante. Le collectif se donne pour objectif de défendre et développer des droits fondamentaux, de répondre à la crise sociale, de réorienter les dépenses grâce à une politique fiscale plus juste et de travailler à une reconversion écologique et sociale.
Malgré un niveau de richesse matérielle inégalé dans l’histoire, ce système arrive à produire précarité sociale, montée de la xénophobie, des nationalismes et crise environnementale. C’est donc par un syndicalisme en prise avec les problèmes du monde que nous pouvons contribuer à lutter contre le fatalisme.
Renforcer le lien avec la profession
A tous points de vue, le renforcement de notre syndicalisme de terrain est l’un des principaux enjeux des mois qui viennent. Il n’y a pas de fatalité qui n’ait jamais été surmontée : les attaques portées au paritarisme, les pressions exercées, les restrictions en termes de droits et de libertés dans l’exercice professionnel, l’épuisement des personnels doivent nous pousser à renforcer les collectifs, qui sont
l’essence-même du syndicalisme. Cela impose d’aller vers les collègues pour les consulter, les informer, les réunir et construire avec eux les mobilisations nécessaires pour parer les attaques contre le métier et les personnels et imposer d’autres choix.
C’est bien le sens que nous donnons à l’enjeu de la consultation à venir avec 50 000 rencontres de collègues. Ce n’est qu’à cette condition que nous convaincrons nos collègues du bien-fondé des idées que nous portons et de l’intérêt du syndicalisme dans la période.
Ce n’est qu’à cette condition aussi que le SNUipp-FSU et la FSU conforteront leur place aux prochaines élections professionnelles.
Cette séquence qui s’ouvre doit également permettre d’analyser l’activité syndicale dans son ensemble, en pointant les acquis et les défaites, et ainsi d’en tirer les conclusions pour un syndicalisme ancré dans le terrain convaincu de vouloir changer l’école et la société.
Elle doit aussi s’accompagner d’une réflexion sur la formation des militant·es de terrain, avec l’objectif du renforcement du lien local avec la profession.