Imposons d’autres choix !
« Je ne céderai rien, ni aux fainéants, ni aux cyniques, ni aux extrêmes. » Pourtant, depuis son élection le 6 mai dernier, Emmanuel Macron n’a eu de cesse de céder aux plus riches, ces « fainéants », ces cyniques, « ces extrêmes ». Ces choix se situent dans la logique des politiques marquées du sceau de l’austérité, qui ne sont rien d’autre qu’une volonté de conquête, de captation toujours plus grande des richesses par celles et ceux qui ont déjà le plus. Et ce, quitte à mettre à mal les solidarités, quitte à assujettir encore plus le salariat et ruiner les gens.
Une politique de classe
A l’échelle mondiale 1 % des plus riches possède autant que les 99 % restants. Les 80 personnes les plus riches possèdent aujourd’hui autant que la moitié de la population mondiale.
En France, les 6000 personnes les plus riches gagnent en un an en moyenne 60 années de SMIC, et leurs revenus ont progressé de 43 % en sept ans. A l’inverse, les 10 % les plus pauvres ont vu leur niveau de vie baisser de 6,2 %. Macron met en place une fiscalité renforçant les inégalités, avançant des baisses d’impôts qui seront captées pour près de la moitié de leur montant par les 10 % les plus riches, et qui de l’autre côté, conduiront à une diminution de la sphère d’action des services publics qui eux profitent à toutes et tous, avec notamment 120 000 suppressions de postes dans l’ensemble de la fonction publique. Il entend diminuer de 25 milliards d’€ le budget de l’Etat, de 15 milliards d’€ les crédits alloués à l’assurance-maladie, de 10 milliards ceux alloués aux collectivités territoriales. Il a annoncé la suppression des emplois aidés, qui permettent d’assurer pourtant, dans les écoles, dans les collectivités locales, dans le monde associatif, des missions d’intérêt général indispensables qui nécessiteraient au contraire des emplois perennes pour ces personnels. 300 000 contrats aidés coutent 3 Milliards par an ; le CICE pour 100 000 emplois coute 24 Milliards.
Face à nous, nous avons un président mal élu, tous les jours plus discrédité, qui persiste dans une politique qui a conduit le FN au second tour de la présidentielle.
Il y a donc une double-urgence. Une urgence sociale, immédiate, à défendre les intérêts de toutes et tous face à ceux de quelques-un-es. Une urgence politique, sur un temps plus long, pour que dans cinq ans les alternatives soient ouvertes face au pire.
Faire dès le début le choix de l’unité
Le 12 septembre, la mobilisation contre la nouvelle loi Travail a sonné, avec un succès au-delà des espérances, les trois coups de la rentrée sociale. Les suites annoncées en commençant par le 21 septembre, sont dès à présent à construire.
Cette loi travail ou plutôt cette loi licenciement tant celui-ci est facilité, y compris pour des multinationales qui auraient une bonne santé financière à l’échelle mondiale et qui organiseraient localement leur difficulté économique. Avec la poursuite de l’inversion de la hiérarchie des normes, c’est la mise en concurrence généralisée des salarié-es qui se met en place, et qui aura pour conséquence une diminution des rémunérations et des protections. La possibilité des référendums à l’initiative des patrons dans les entreprises de moins de 50 salarié-es, l’abandon des CHSCT, le plafonnement des indemnités prudhomales en cas de licenciement sont autant de coups portés à la protection des salarié-es.
Construire la convergence des luttes
Nul doute, dans un prétendu souci d’égalité, comme pour les réformes des retraites de 1993 et de 2003, la volonté sera forte d’aligner les droits de la Fonction publique sur les reculs du privé. A cela s’ajoutent les menaces sur le code du travail qui ont des incidences quasi-directes dans la Fonction publique, comme la définition de durée légale du travail ou le niveau du salaire minimum. Les réformes à l’œuvre dans la nouvelle loi Travail entrent en résonance avec ce que nous vivons dans la Fonction publique. Ainsi l’inversion de la hiérarchie des normes n’est pas sans lien avec ce qui se passe dans l’éducation, avec la fissuration d’un cadre national : les écoles de plus en plus soumises aux élu-es locaux, les collèges et les lycées dont les enseignements sont désormais à géométrie variable, les universités soumises à l’autonomie intégrale y compris financière.
La définition locale de la charge de travail n’est pas un mal qui touche seulement le privé. De plus en plus les fonctionnaires sont soumis à l’arbitraire des hiérarchies. Les annonces faites ne peuvent qu’inquiéter : dans l’enseignement, le ministre annonce déjà vouloir permettre le recrutement des professeur-es par les chef-fes d’établissement. Dans la Fonction publique où les CHSCT viennent tout juste d’être mis en place, il y a fort à parier qu’ils disparaîtront sans avoir eu le temps de développer leur capacité d’action concernant les conditions de travail des personnels.
Sans compter l’augmentation conséquente des emplois précaires intervenant dans nos écoles.
Ces analyses partagées ont conduit la moitié des sections départementales de la FSU à appeler à la grève le 12 septembre. De nouvelles dates de mobilisations sont d’ores et déjà connues. Le SNUipp et la FSU doivent en être partie prenante de façon pleine et entière en appelant explicitement à la grève ce qui permettra de mener un véritable campagne de mobilisation auprès de la profession.
Articuler loi travail et fonction publique
La convergence des mobilisations sera aussi essentielle dans la bataille que nous entendons mener contre les attaques faites à la Fonction publique. Avec le gel du point d’indice, le retour de la journée de carence, le report possible des mesures PPCR, les suppressions de postes, Macron est aussi entré en guerre contre les fonctionnaires et la fonction publique. De ce point de vue, le 10 octobre doit être une journée de grève et de manifestations en écho des mobilisations actuelles.
L’exemple de la mobilisation contre la loi El Khomri a montré qu’il y avait possibilité d’articuler une mobilisation plus générale avec des mobilisations sectorielles. Ainsi les routiers avaient obtenu à l’époque gain de cause. Il nous faut construire une véritable résistance sociale sur le terrain interprofessionnel, fonction publique et sur celui de l’Education Nationale. Car là aussi, il faut mettre un coup d’arrêt aux politiques qui creusent les inégalités.
L’Education selon Blanquer : le choix du renforcement des inégalités
Dans l’éducation également, le choix est fait de renforcer les inégalités et les déterminismes sociaux sous couvert de lutte contre l’égalitarisme, devenu pour les libéraux le mot de tous les maux : individualisation des parcours et des apprentissages qui passe par l’éloge des « talents » et « des intelligences multiples », abandon du collège unique au profit d’un collège commun, resserrement sur les supposés fondamentaux contre notre « toutes et tous capables ».
Renforcement des dispositifs de territorialisation du système éducatif contre la protection et le caractère égalitaire du cadre national.
Logiques d’autonomie de gestion et de pilotage par l’évaluation contre la professionnalité et le pouvoir d’agir des enseignant-es.
Son mode d’imposition du dispositif CP à 12, tout comme la mise en place d’évaluations en CP et 6ème sont des premiers exemples de ces choix. Il remplace la force du collectif des PDM par des dédoublements focalisés sur un seul niveau.
Il entend mettre sous tutelle les enseignant-es et leur faire appliquer des pratiques élitistes par des évaluations qui tranchent dans ce qu’est l’acte de lire ou de compter sans prendre en compte le rapport au savoir des élèves des milieux populaires.
Blanquer fait de la question pédagogique un espace d’affrontement entre deux choix de société : l’un qui légitime la reproduction des inégalités, l’autre qui la combat.
Le SNUipp-FSU a su faire l’analyse de ce qu’allait être l’école selon Blanquer. Il nous faut convaincre en menant campagne : expliquer, informer mais aussi agir. Ainsi nous devons appeler les enseignant-es à refuser ces évaluations CP (passation et/ou remontée). Reprendre la main sur le métier, ensemble, avec les personnels.