Retour sur la grève des cheminot-es
Questions à… Patrice Perret, membre du bureau de l’Union Solidaires Transports.
◗ Peux-tu nous rappeler les raisons de la grève ?
SUD-Rail et la CGT ont expliqué le contenu du projet de loi qui abroge le statut SNCF et la réglementation sur la durée et les conditions de travail, qui impose un fonctionnement fragilisant la sécurité et la qualité de services, et qui franchit une étape supplémentaire vers la privatisation des secteurs rentables.
La loi redécoupe le système ferroviaire, le divise encore plus, transforme l’actuelle SNCF en simple exploitant ferroviaire soumis à la concurrence des autres, par le fait qu’elle perd 50 000 cheminot-es transférés à « SNCF Réseau » qui récupère ainsi totalement les rôles de gérant des infrastructures et de la circulation ferroviaire.
◗ Quelle particularité à l’unité syndicale (CGT, SUD-Rail) ?
La forte unité sans faille de la CGT et de SUD-Rail, représentant plus de la moitié des cheminot-es, a tenu, y compris dans la gestion de la fin de la grève, ce qui ne s’était jamais vu. Sur le terrain, elle a permis le regroupement des cheminot-es les plus combatifs, dont l’arrêt de travail a bloqué une bonne partie des circulations ferroviaires.
Cette unité s’est construite sur une plateforme revendicative rédigée avant la grève par les organisations syndicales CGT, SUD-Rail et UNSA, portée pendant tout le conflit par les grévistes, la CGT et SUD-Rail, y compris lorsque des voix, notamment de Thierry Le Paon, ont envisagé la fin de la grève.
Cette plate-forme avançait :
- une réelle réunification du système ferroviaire public autour de la SNCF avec une seule direction embauchant au statut,
- la reprise de la dette et le financement des travaux de régénération par des ressources nouvelles,
- un report modal massif des transports de marchandises et de voyageurs de la route vers le rail,
- un décret socle et une convention collective reprenant la réglementation du travail de la SNCF, applicable à tou-tes les salarié-es du secteur.
◗ Qu’est ce qui a manqué pour gagner ?
Il a manqué le soutien de l’opinion publique, anesthésiée par tous les grands médias qui n’ont pas informé des raisons de la grève, qui ont mis en avant des clients bloqués, puis des bacheliers ratant leur examen, qui ont relayé les arguments du gouvernement et de la direction de la SNCF, citant de fausses statistiques de grévistes, affirmant que la grève était inutile…
Cette opinion publique peut être gagnée, si la forte unité syndicale cheminote s’étend à l’interprofessionnel, c’est-à-dire si la ligne politique contre la concurrence, portée par la fédération des CGT cheminots s’étend à la confédération.
Nous devons nous appuyer sur la mobilisation sociale naissante contre le Traité transatlantique, afin qu’elle intègre un large refus de la concurrence ferroviaire pour les voyageurs, et exige la fin de la concurrence routière pour le fret. ●
Propos recueillis par Sophie Zafari
Intermittent-es en lutte
Depuis la grève historique de 2003, la précision de l’expertise, la pugnacité de certain-es et le lien entretenu avec quelques organisations syndicales auront permis aux Coordinations des intermittents et précaires d’être entendues par quelques député-es ainsi que la mise en place un comité de suivi.
Celui-ci a travaillé à des préconisations pour un avenir possible, c’est-à-dire plus économique et plus juste, du régime spécifique d’indemnisation des artistes et techniciens intermittents du spectacle.
Aucune de ces propositions n’a été considérée dans les « négociations » de 2014.
La convention du 22 mars sur l’assurance chômage continue de vider de leur substance les annexes VIII et X (intermittent-es) et l’annexe IV (intérimaires) pour, à court ou moyen terme, les faire disparaître.
Voyant le vent se lever, Aurélie Filippetti obtiendra le 17 avril, et pour les seules annexes VIII et X, la modification à la marge de l’application d’un « différé d’indemnisation », dernière trouvaille retorse destinée à assommer les plus faibles.
C’était ne pas vouloir entendre que nous nous battions pour tou-tes. Le printemps des comédiens reconduit chaque jour courageusement sa grève.
Le festival Uzès danse annule son édition 2014. Les actions se multiplient. Il est commandé hâtivement un rapport au député J-P. Gille.
L’intervention de Valls le 19 juin, écrite par le même Gille, n’aura pas calmé le cœur de notre lutte qui au contraire a trouvé dans la convergence avec celles engagées par des postiers, des cheminots, des enseignants… de nouvelles énergies.
Pas un festival de l’été, y compris ceux de musiques dites « actuelles », qui ne deviendra un porte-voix de nos luttes.
Parallèlement se tiennent durant le mois de juillet les quatre premières réunions de concertation autour du trio H. Archambault, J-D Combrexelle, J-P. Gille nommé par Matignon pour « sortir durablement de la crise ».
Pour la première fois, deux représentants des Coordinations sont, parmi d’autres, face aux syndicats signataires et au patronat.
Sans surprise, chacun campera globalement sur ses positions. Les contributions et expertises réalisées serviront de base aux axes de propositions de la suite de la concertation qui devrait aboutir en décembre à la remise d’une synthèse à M. Valls.
D’ici là, devraient nous parvenir les verdicts de la plainte déposée en justice par la CGT pour dénoncer le paritarisme de façade des négociations et des recours déposés devant le Conseil d’État par les Coordinations, Recours radiation, les Matermittentes et la CGT qui dénoncent le caractère discriminatoire de la précarisation de certaines catégories de travailleurs ou de privés d’emplois induit par la nouvelle convention UNEDIC.
Et bien sûr nos actions continuent comme à Aurillac le 23 août. ●
Matthieu Doze