Avant vendredi, je voulais évoquer ici les offensives des extrêmes droites contre les migrant-es : appels à manifestations dans plusieurs villes de France, initiés par des régionalistes, des Identitaires, ou encore le Parti de la France de Carl Lang, mais aussi courses poursuites, intimidations, banderoles hostiles, voire agressions caractérisées comme l’attaque au cocktail Molotov d’un squat de réfugié-es à Nantes. Inquiète de possibles lynchages, je voulais soulever la question de cette violence xénophobe qui montait, et de la responsabilité du Front national.
Celui-ci tente en effet de tirer son épingle du jeu en se démarquant de ces groupuscules et de leur violence directe, tout en continuant à diffuser son message d’exclusion plus sournois, avec par exemple un appel à « manifester contre les migrant-es dans les urnes »… Il prend ses distances, alors même que les liens sont avérés, pour preuves les affaires judiciaires concernant le financement illégal du micro-parti de Marine Le Pen, ou les soutiens de sa nièce.
Et puis il y a eu les attentats de vendredi…
Et presque immédiatement sur certains réseaux sociaux un déferlement de propos racistes et islamophobes. Et le FN qui a eu l’indécence de profiter de ces événements tragiques pour dérouler son programme. A Pontivy, une manifestation d’Identitaires bretons contre les migrant-es aurait dégénéré aux cris de « On va les tuer, ils n’ont rien à faire ici », et un homme d’origine maghrébine aurait été roué de coups. A Paris, dimanche, il a suffi qu’une ampoule halogène claque dans le Marais, provoquant un début de panique, pour qu’un témoin dise avoir entendu « Allah Akbar ».
Et pourtant… De nombreux exilé-es qui arrivent massivement aux portes de l’Europe depuis des mois fuient justement ces mêmes horreurs, la violence terroriste qui frappe, tue, mutile, et semble pouvoir survenir à tout moment. Les premières victimes de Daech sont des populations musulmanes de Syrie, d’Irak, de Turquie, du Liban… Beyrouth fut touchée la veille des attentats de Paris. Pourquoi n’a-t-on pas vu alors, partout dans le monde, des monuments s’illuminer d’un cèdre ? La compassion et la solidarité nécessiteraient-elles une proximité géographique ou culturelle ? Les vies humaines n’auraient-elles pas partout la même valeur ? Y a-t-il des pays de seconde zone ? Des citoyen-nes de seconde zone dans nos quartiers défavorisés ? Ces distinctions sont de celles qui alimentent le racisme, qui détruisent l’universel.
Si nous continuons à voir en l’autre un étranger, un danger, alors les terroristes auront gagné. Et les extrémismes continueront de se nourrir mutuellement. Le but de l’État Islamique est de dresser les communautés les unes contre les autres, au Moyen-Orient comme en France. Ils veulent nous forcer au repli identitaire, comme le veulent aussi les extrêmes droites occidentales. Ce n’est pas un hasard si les quartiers parisiens visés vendredi sont ceux de la diversité, du brassage. Daech a en commun avec les Identitaires cette aversion profonde du métissage, qu’il soit biologique ou culturel.
Heureusement, des manifestations de solidarité aux migrant-es s’organisent également, avec la participation de syndicalistes. (Ce qui a valu à notre camarade de la FSU 03 des attaques virulentes de la part de Riposte Laïque.)
Battons-nous avec nos mots, avec nos idées, ensemble. A la peur, à la division, à la haine, répondons par la solidarité, l’égalité, la justice sociale, la paix, en un mot l’humanité. Pour que le hashtag parisien « portes ouvertes » se décline un jour à toute la planète.