Le chiffre est aujourd’hui largement connu : depuis maintenant deux ans, à l’échelle mondiale, les 1 % les plus riches possèdent plus que les 99 % restants. En France, les 10 % les plus riches accaparent 56 % des richesses. 21 milliardaires possèdent autant que les 40 % les plus pauvres de la population. En 20 ans, la fortune totale des 10 plus grandes fortunes françaises a été multipliée par 12 pendant que le nombre de pauvres augmentait de 1,2 millions de personnes. Constat dramatique.
Mais constat qui n’est en rien le produit d’une fatalité ou un phénomène quasi-naturel : c’est le fruit d’une entreprise active de captation des richesses par ceux qui ont déjà le plus au détriment des populations. Et cette entreprise s’ancre dans le déploiement de politiques très concrètes menées par des gens très concrets.
Emmanuel Macron fait partie de ses gens. Et il entend avancer encore d’un nombre de pas conséquent dans l’exacerbation des inégalités, en utilisant trois leviers : diminuer la participation des plus riches aux systèmes de solidarités et de redistribution, réduire la sphère des services publics au profit du privé, et intensifier le travail et en diminuer la rémunération.
Le projet de loi de finance soumis à l’Assemblée Nationale prévoit des baisses d’impôts de près de 24 milliards d’€ sur l’ensemble du quinquennat très inégalement répartie. Entre la suppression de l’ISF remplacée par un impôt sur la fortune immobilière qui exclut le patrimoine financier de l’imposition, l’instauration du prélèvement forfaitaire unique au détriment d’une imposition progressive des revenus du capital, ou les nouveaux cadeaux fiscaux aux entreprises, les 10 % les plus riches captent 46 % des gains des mesures fiscales annoncées. Comme le pointe l’OXFAM, si l’on fait le bilan après diminution des impôts et baisse des prestations sociales envisagées, les 10 % les plus riches verront leurs revenus augmenter de 1193 € par an quand celui des 10 % les plus pauvres baissera de 337€, le revenu médian baissant lui de 69€.
Cette diminution des impôts, qui acte la baisse de la participation des plus riches à la solidarité, conduit à un resserrement de la place des services publics. Le gouvernement entend faire baisser de 3 points la part des richesses consacrées aux dépenses publiques. 120 000 suppressions de postes de fonctionnaires sont envisagées. L’hôpital sera aussi impacté avec le développement d’une stratégie nationale de santé présentée dans les mois qui viennent. Les collectivités locales devront subir une baisse de dotation nationale de près de 13 milliards d’€. Chaque abandon de mission d’intérêt général par le public est un cadeau fait au privé, et donc aux plus riches.
Enfin, les mesures visant à intensifier le travail et à en diminuer la rémunération impactent tant les salariés du privé que ceux du public. C’est le sens de la réforme du code du travail contre laquelle une partie du syndicalisme lutte : diminuer les protections, c’est offrir des armes au patronat pour augmenter l’exploitation. C’est aussi ce que nous vivons dans la fonction publique, avec des conditions de travail dégradées, un temps de travail qui explose, et le gel du point d’indice ou le report des revalorisations indiciaires prévues par PPCR.
Pourquoi est-il important de dresser ce tableau ?
Il nous faut saisir à quels endroits Macron mène concrètement l’affrontement avec le salariat pour poursuivre l’augmentation de la rémunération des plus riches, car c’est là qu’il nous faut répondre pied à pied. Nous avons besoin de réfléchir collectivement à une stratégie syndicale à même de mettre à bas l’ensemble de la politique Macron. Sans tout en dire, car d’autres en parleront, il faut arriver à faire voir au salariat la force qui est la sienne quand il est dans l’action ensemble. Cela implique de faire vivre des moments de mobilisations communes, et donc de travailler concrètement à l’unité du syndicalisme qui vise l’affrontement avec Macron. Il nous faut donc discuter avec la CGT, Solidaires et toutes les forces volontaires pour instruire ce rapport de force, d’une stratégie d’action à même de lutter dans le même temps contre l’intensification du travail, la réduction de la sphère des services publics et la politique budgétaire menée par ce gouvernement.