Depuis début mars, le plus grand mouvement interprofessionnel contre un gouvernement dit de « gauche » met en grande difficulté la politique pro-Medef de Hollande et Valls. Des centaines de milliers de jeunes, de salarié-es en CDI ou précaires, de retraité-es descendent dans la rue ou sur les places, en manifestation ou lors de Nuit Debout. Avec le soutien de la majorité de la population, ils exigent le retrait du projet de loi « travail » qui remet en cause des décennies de conquêtes sociales.
Ce rejet massif est d’autant plus remarquable que ce texte a d’emblée bénéficié du soutien d’un arc politique allant de la majorité du PS à la droite – qui le conteste à présent – et, très vite, des syndicats d’accompagnement (CFDT, UNSA, CFTC et CGC). Il faut mesurer la hauteur de cette victoire idéologique dans un contexte marqué depuis tant d’années par les défaites du monde du travail face au néo libéralisme. C’est le cœur même de ce projet, sa « philosophie », avec l’inversion de la hiérarchie des normes et son avenir de précarité, qui est encore et toujours rejeté. Une exigence radicale, fruit d’une mobilisation inédite conjuguant plusieurs dynamiques qui ont permis ce fort ancrage social. D’abord, les 1,3 million de signatures de la pétition « loi travail : non merci » et la multiplication des témoignages sur la précarité sur le site « on vaut mieux que ça » ont créé les conditions de la participation de salarié-es éloigné-es des syndicats aux manifestations appelées par les organisations de jeunes et celles de salarié-es. Cette mobilisation du monde du travail a ouvert un espace pour l’occupation des places dans le cadre des « Nuit Debout » qui ont à leur tour nourri le mouvement d’autres débats, sur la réappropriation de l’espace public et de la parole politique. Ce phénomène nouveau est particulièrement important dans la reconstruction d’une conscience collective et mobilisatrice, alternative au libéralisme, notamment pour les nombreux jeunes qui y participent.
La multiplication des interventions et violences policières comme le recours au 49-3 sont les marques de fabrique « sociale » de ce gouvernement se disant de « gauche ». Ce sont surtout les signes de la grande fébrilité et de la grande difficulté dans laquelle il se trouve face à une opposition majoritaire de la société à son projet de contre réforme.
Ce n’est donc pas le moment de lever le pied mais bien au contraire de tout mettre en œuvre pour faire basculer la situation. Les échéances proposées par l’intersyndicale sont autant de points d’appui pour permettre au mouvement de s’inscrire dans la durée, de garder sa vitalité, d’atteindre son but. La grève du 26 mai est une nouvelle occasion pour nous de s’adresser aux collègues pour leur expliquer en quoi la Fonction publique est également concernée par ces projets libéraux, pour convaincre notre milieu professionnel de s’engager dans la lutte. Le gouvernement sera confronté à d’autres échéances à l’Assemblée et la grève et manifestation nationales du 14 juin doit permettre à la mobilisation de s’amplifier. Il faut mettre maintenant toutes les forces dans cette bataille, que ce soit par la grève, les manifestations, les blocages en tout genre, en conservant le soutien majoritaire de la population. ●
Christian Navarro