Il y a un an, la FSU a applaudi l’annonce de la relance de l’Éducation prioritaire (EP), sans réserve aucune, se satisfaisant de la communication ministérielle : fin des ECLAIRs, remise à plat des politiques éducatives, de la gouvernance et des moyens attribués à l’EP.
Pourtant ces moyens (350 millions) consentis à l’EP, qui ont d’abord permis à la FSU de se féliciter de ces annonces, Peillon n’a jamais caché les obtenir par un redéploiement budgétaire interne à l’Éducation Nationale.
Là, comme trop souvent, la fédération n’a pas produit l’analyse critique nécessaire permettant de caractériser les choix politiques et budgétaires du gouvernement, et leurs conséquences. Aveuglement condamnable.
La violence des années Sarkozy, la violence de la crise économique et sociale, ont laissé notre école exsangue : être en EP relève donc du « vital » pour espérer maintenir des conditions souvent à peine décentes de travail et d’étude.
Quand le MEN annonce une carte des REP au format identique (1082 réseaux) mais qui inclut, de façon légitime, Mayotte et la Guyane, certains réseaux sont alors les perdants de cette nouvelle donne.
En novembre, en décembre et encore en janvier, des réseaux se sont mobilisés, avec personnels, parents et élus, pour exiger leur maintien ou leur entrée en EP.
Les mobilisations aux modalités diverses, très déterminées, ont dénoncé avant tout la logique comptable : une carte définie a priori, indépendamment des besoins réels, et dans laquelle il faut jouer des coudes pour trouver une place, jouer des coudes au détriment du voisin.
Tout cela sur fond de manque de transparence des critères, d’inégalité et d’injustice (Traitement différent pour une élémentaire et sa maternelle, écoles « orphelines » exclues automatiquement avec leur collège, secteurs ruraux oubliés…)
**Pourquoi « être en REP », ne règle pas tout
Outre la question de la carte, un regard critique est nécessaire envers cette réforme qui présente de graves lacunes : volet formation très minime, stabilisation des équipes réduite au sujet des primes, pas de personnels supplémentaires sauf par redéploiement (donc retirés « hors EP », comme c’est le cas des AS). Surtout, la question centrale des effectifs est ignorée.
**Un mouvement qui n’a pas dit son dernier mot
Pour les personnels, les mesures budgétaires conséquentes appellent à la nuance : la plus emblématique reste la pondération en REP +.
Mais l’application de cette mesure pose de sérieux problèmes de gouvernance, et les équipes souffrent aujourd’hui des pressions exercées plus qu’ils ne bénéficient du prétendu temps libéré.
Quant à l’augmentation des primes EP, elle est évidemment bienvenue pour une profession qui ne cesse de voir son pouvoir d’achat diminuer. Mais la logique indemnitaire n’est pas sans poser problème car elle représente un frein à la revalorisation salariale pour l’ensemble des personnels.
Dans le prolongement des mobilisations locales, la FSU a appelé à un rassemblement national le 17 décembre, jour du CTM ; le MEN y a consenti un élargissement -ridicule- de la carte en faisant rentrer 7 réseaux supplémentaires.
Dans les académies, si quelques écoles ont gagné leur réintégration, la plupart des établissements mobilisés n’ont obtenu que les promesses floues de l’administration, qu’il s’agisse des CAPE (convention académique de priorité éducative) censées garantir des moyens pour 3 ans (donc en deçà de la carte, effective pour 4 ans…) ou encore de « l’allocation progressive des moyens », une mesure qui permet de moduler l’attribution de moyens de façon sélective, en restant dans une enveloppe contrainte.
Le cadre du redéploiement est maintenu : tenir les maigres promesses faites à l’EP, ce sera grever lourdement les dotations des établissements qui n’en relèvent pas.
Il était nécessaire de faire converger les mouvements dès le mois de novembre, notamment par la perspective d’une grève nationale de l’EP en décembre.
Aujourd’hui, c’est la grève du 3 février qu’il faut construire et réussir. En s’appuyant sur la colère et les mobilisations encore vives en EP. En dénonçant les choix budgétaires qui mettent en concurrence les besoins des écoles et des établissements.
En menant la bataille de l’EP (élargissement de la carte, gouvernance et politiques éducatives) et en l’élargissant à l’ensemble de l’Éducation Nationale. ●
Véronique Ponvert