Un an après le vote bafoué des législatives, la période estivale a été marquée par la montée d’une colère sociale qui, après le rejet massif de la loi Duplomb, s’est cristallisée sur le projet de budget, défendu par François Bayrou, seul et contre tou·tes, méprisant la contestation. Ce plan d’économies de 44 milliards d’euros dont la charge va peser sur les plus fragiles et les services publics constitue une véritable casse sociale, il fait l’impasse sur la juste contribution des plus riches et tourne le dos aux besoins de la population.
La chute du gouvernement Bayrou est le prolongement de cet été sous pression, marqué par le refus massif d’un budget austéritaire et inégalitaire. La nomination express de Sébastien Lecornu, ex-ministre des Armées et proche de Macron, apparaît comme un nouveau bras d’honneur au mouvement social et ne laisse aucun doute sur la poursuite du cap engagé depuis 2017.
Dans un contexte où la gauche montre déjà son incapacité à surmonter les divisions, à s’unir et à rassembler comme elle l’a fait dans le Nouveau front populaire (NFP), la hauteur de la mobilisation lors de la journée du 10 septembre est d’ores et déjà une réussite. Construite sur un mot d’ordre simple – « Bloquons tout » – sa préparation, partout sur le territoire, a relancé une dynamique de construction d’actions, rassemblant des citoyen·nes, des associations, des syndicats et des partis politiques. Le déploiement disproportionné du dispositif de police, la volonté de museler la presse, les atteintes à la liberté de manifester et la répression dans les cortèges montrent l’extrême fébrilité d’un pouvoir autoritaire, fortement remis en cause dans ses choix.
Cette première journée de mobilisation a montré la volonté d’engager un bras de fer pour gagner un autre budget fondé sur un juste partage des richesses et la taxation des plus riches. Cela ne sera possible qu’à condition d’élever le niveau de conflictualité après le 18 septembre. Il appartient donc aux organisations syndicales – et a fortiori à celles relevant du syndicalisme de lutte et de transformation sociale – d’organiser les luttes dans la durée, de construire un cadre à l’expression de la colère sociale et de travailler aux convergences de mobilisation, en mettant en perspective, à l’opposé du projet de l’extrême droite, la possibilité de gagner des avancées sociales et d’imposer des alternatives aux politiques austéritaires et inégalitaires.
La séquence pose les ingrédients d’une rupture et ouvre une temporalité où le basculement est possible. Dès lors, il est nécessaire de croire et de défendre la puissance d’un autre imaginaire en rendant crédibles les alternatives. Cela implique de faire pression sur les organisations de notre camp social pour avancer dans l’unité vers d’autres possibles.
SANDRINE MONIER