Oser construire un Front Social et Politique

Nous étions nombreux·ses à alerter il y a presque un an et demi sur le décompte qui nous séparait de l’arrivée du fascisme au pouvoir. Minuit moins le quart… minuit moins cinq… minuit moins deux.

Et maintenant, quelle heure est-il exactement ? Quelle heure est-il quand Retailleau, niant aux mobilisations du 10 la qualité de mobilisations citoyennes, nie du même coup le statut de citoyen·nes de celleux qui s’opposent à lui ? Quelle heure est-il quand peut être nommé premier ministre un homme qui fustige le « communautarisme gay » ? Quelle heure est-il quand les tenant·es de la droite ne peuvent plus prononcer le mot « gauche » sans y accoler « extrême » ou « ultra » et appellent de leurs vœux comme le fait Wauquiez « un changement de fonctionnement de notre état de droit » ? Face à une Macronie qui sans aucune légitimité s’accroche à un pouvoir en lambeaux dans l’objectif de poursuivre son œuvre de destruction sociale, la période appellerait à l’union de toutes les forces de résistance, qu’elles soient syndicales, politiques, associatives ou sous la forme de collectifs avec une structuration moins institutionnelle.

Entrer en action avec un débouché politique aux luttes est un réel moteur de mobilisation : les luttes sont nourries par les urnes comme l’a montré le Front Populaire de 36. Et récemment la séquence du NFP, permise par la puissante mobilisation des retraites, a montré les possibilités d’union programmatique construite notamment sur la base des revendications syndicales : les urnes nourries par les luttes. Il y a donc un réel enjeu stratégique  à court terme, pour renforcer la mobilisation et gagner un autre budget. Mais aussi à moyen et long terme pour répondre à la crise politique et institutionnelle ouverte depuis plus d’un an : il faut  ouvrir les espaces de discussion, de disputes et de construction commune à l’ensemble du mouvement social sans exclusive.

La FSU, et la FSU-SNUipp, font incontestablement partie des forces en capacité de le mettre en discussion. Il nous appartient d’être présent·es partout où le mouvement va se construire et de servir de trait d’union pour faire dialoguer celles et ceux qui ne sont plus en capacité de le faire. C’est en ne reproduisant pas les erreurs des mobilisations globales passées, de la marée populaire de 2018 au NFP en passant par les gilets jaunes, qu’il nous deviendra possible de construire un front social et politique en capacité de peser sur les enjeux actuels et les échéances à venir. C’est aussi ainsi qu’il deviendrait possible de dépasser le fatalisme d’un mouvement social dont les dernières victoires semblent lointaines, mais aussi rendre le syndicalisme moins dépendant du politique car en position de co-construire et faire que les perspectives politiques correspondent donc le plus aux exigences du mouvement social. Ces liens indispensable entre notre champ professionnel qu’il faut bien sur mobiliser, les collectifs qui s’auto-organisent, les intersyndicales dont le périmètre peut varier selon les moments de la mobilisation, et les partis politiques, c’est à nous qu’il revient de les tisser avec toutes les forces qui seront disponibles pour gagner et imposer des alternatives.