Alter Summit/alter-sommet, sommet des peuples et des alternatives

Les limites rencontrées par les derniers FSE on poussé à une réflexion sur le type de mobilisations
à construire. Le processus de l’Alter Summit est lancé à Florence fin 2012.
En juin 2013, Athènes sera le point de convergences des luttes et des résistances
dans la guerre déclarée contre les peuples par les tenants de l’ordre libéral.

En mars dernier, la Conférence sociale conjointe (réseau d’organisations syndicales-dont la CES- associatives, d’ONG, né lors du FSE de Malmö) décide de lancer le processus de construction d’une mobilisation européenne pour 2013. « Nous assistons aujourd’hui à un tournant historique majeur dans l’Union européenne. Les dirigeants européens, et en particulier ceux de la Commission, du Conseil ECOFIN et de la Banque centrale européenne, tirent profit de la crise actuelle pour imposer un ordre néolibéral antinomique avec l’idéal d’une Europe démocratique, sociale, écologique.»

Des actions pour répondre
à l’urgence et à la gravité
de la situation

C’est bien l’urgence et la gravité de la situation qui est à l’origine de cette initiative : l’urgence c’est de « réaliser la convergence des forces, et leur unité concrète dans l’action.» insiste Felipe Van Kleirsbilck syndicaliste belge de la CSC, initiateur et coordinateur de l’Altersummit, à chacune de ses interventions. C’est à la construction d’un programme d’actions que l’Altersummit veut se consacrer. En ce sens, son processus veut dépasser les limites rencontrées dans les FSE : il s’agit vraiment de centrer la réflexion sur les questions stratégiques et de se mobiliser par des actions concrètes afin de peser sur le rapport de forces.

Il reste organisé par le mouvement social en dialogue avec des personnalités intellectuelles et politiques. Si les organisations parties prenantes sont issues de 17 pays (Belgique, France, Italie, Grande-Bretagne, Espagne, Grèce, Roumanie, Hongrie, Norvège, Portugal…), les implications des organisations syndicales sont très inégales. En France, CGT, FSU et Solidaires sont parties prenantes côté syndical. Côté associatif et mouvements, on retrouve ATTAC, Copernic, la LDH, Transform, la Marche mondiale des femmes…

Firenze 10+10

C’est lors de la réunion européenne Firenze 10 +10 (novembre 2012) que le lancement a eu lieu : les objectifs, la feuille de route avec les différents rendez-vous, l’organisation du travail, ont été déclinés : « il s’agit donc de cons-truire, sans délai, les bases d’un véritable mouvement social européen. Le projet repose sur le développement de coalitions nationales ou régionales à travers toute l’Europe, et sur une série d’étapes dans la mobilisation.». Un lancement dynamique, mais les différentes rencontres de travail montrent que ce travail est à la croisée de cultures et d’horizons collectifs politiques, sociaux divers, pas forcément aisément compatibles.

Ainsi, la discussion pour dégager un compromis sur les quatre axes de mobilisations (politiques d’austérité, transition écologique, dette publique, rôle des banques, droits sociaux et du travail) a révélé différentes positions.
Mais c’est aussi le débat sur les objectifs qui traduit des priorités diverses : faut-il se concentrer sur l’adoption d’un appel (et ajouter un appel aux nombreux appels déjà existants) ou se concentrer sur la mobilisation, sur la construction du rapport de forces ?

L’expérience des luttes de ces années de crise montre que ce qui importe n’est pas tant les slogans ou les alternatives : le refus des mesures d’austérité, le « non et le rejet simple mais ferme des contre-réformes permet une unité indispensable et la construction d’un rapport de force plus favorable. On l’a vu notamment en Espagne avec la marée sociale qui occupait les rues à l’appel de 15M ou le 15 septembre dernier au Portugal (plus large mobilisation depuis la révolution de 1974) avec un slogan clé simple : « que se lixe a troïka » (fuck Troïka).

Athènes, juin 2013 :
un sommet des peuples
et des résistances

Lors de la réunion qui s’est tenue à Bruxelles les 13 et 14 décembre dernier, le débat s’est concentré sur le contenu à donner à la rencontre d’Athènes. Là aussi, deux visions assez différentes se sont exprimées : celles et ceux en faveur d’un sommet, limité en nombre de participants, en fait des représentants d’organisations qui se rassemblent pour approuver une déclaration. Et celles et ceux en faveur d’un alter sommet, évènement rassemblant organisations, militant-es, peuples en résistance : Athènes devrait devenir une mobilisation européenne contre la crise en Europe, du type des contre-sommet que nous avons connu dans le passé contre les institutions comme la Banque mondiale et le FMI et le G8, et bien sûr avec l’expression d’une solidarité avec la résistance du peuple grec, en lutte contre les memorandums imposés par la Troïka (BCE, FMI, UE).

En route pour Athènes

Ces différences, toutefois, ne sont pas nécessairement exclusives. Le meilleur moyen d’avancer, de surpasser les doutes et les différences sera l’expérimentation pratique. D’autant que la réalité de la campagne de mobilisation pour l’Altersummit sera différente d’un pays à l’autre. La feuille de route adoptée à Bruxelles insiste d’ailleurs sur la nécessité de construire des cadres unitaires pour populariser l’initiative et pour l’inscrire dans le contexte des luttes concrètes qui existent dans chaque pays. Elle souligne l’importance de l’objectif : construire une mobilisation européenne qui s’appuie sur les mobilisations des différents pays et qui, dans le même temps, les renforce.
En France, un comité « alter sommet » s’est mis en place dès septembre. Il travaille conjointement avec le collectif CAC-la dette dont les collectifs locaux seront des points d’appui pour le développement de la mobilisation.

Campagne de mobilisation :
Tribunal, caravanes…

A l’initiative d’Attac, une initiative intéressante est également débattue avec comme objectif « de développer une dynamique d’actions et de mobilisations à dimension européenne impliquant effectivement les citoyens en partant de leurs préoccupations immédiates ». Il s’agit d’appeler « les citoyens européens à créer, à partir de leurs lieux de vie et de leurs préoccupations concrètes, un espace public européen de réflexion critique, d’expression culturelle et artistique, de débat politique et de proposition d’alternatives, sous la forme de sessions décentralisées d’un « tribunal européen des fauteurs de crise »
Il y a aussi le projet d’organiser des caravanes unitaires pour mobiliser autour de l’Altersummit, qui passeraient par les entreprises, services publics en lutte et autres lieux de luttes écologiques et sociales.

Il peut sembler que les 8 et 9 juin soient loin, mais pour construire des dynamiques sociales, le temps urge et c’est dès aujourd’hui qu’il faut populariser ce processus. Il y a trois ans, les puissances économiques et les institutions européennes ont uni leurs efforts pour déclarer une guerre sociale sans limites aux peuples de l’Europe, 2013 doit être l’année où la résistance européenne « qui fait peur à l’adversaire » émerge.

Sophie Zafari

Extraits de la déclaration Altersummit

« Nous assistons aujourd’hui à un tournant historique majeur dans l’Union européenne. Les dirigeants européens, et en particulier ceux de la Commission, du Conseil ECOFIN et de la Banque centrale européenne, tirent profit de la crise actuelle pour imposer un ordre néolibéral antinomique avec l’idéal d’une Europe démocratique, sociale, écologique.

[…]

Les sommets européens qui se multiplient ont totalement échoué à atteindre leurs objectifs prétendus, à savoir « restaurer la confiance des marchés » et résoudre la crise de la zone euro.

[…]

Les citoyens sont en droit de se demander si ces objectifs prétendus ne masquent pas une autre stratégie : profiter de l’opportunité de la crise, quitte à l’aggraver, pour basculer dans un tout autre régime qui parachèverait le modèle néolibéral au prix de leurs droits sociaux et démocratiques .

[…]

Nous disons « c’est assez ! ». Nous n’acceptons plus ces politiques. Elles bafouent la démocratie ; elles ont d’ores et déjà plongé l’Europe dans une crise économique particulièrement grave. Elles réveillent les démons xénophobes que la création de l’Europe avait en principe vocation à éradiquer. Nous voulons améliorer le modèle social européen et défendre les peuples, et non les banques, les grandes entreprises et leurs principaux actionnaires.
Cela demande d’autres politiques, ce qui suppose de revoir aussi les institutions et les Traités : pas dans le sens d’un durcissement du néo-libéralisme punitif, mais au contraire pour reconquérir la démocratie. Les alternatives existent. Ce qui manque aujourd’hui, c’est un rapport de forces pour concrétiser ces alternatives et imaginer les processus politiques à mettre en œuvre pour remettre le projet européen sur la voie de la démocratie et du progrès social et écologique. Le sommet alternatif auquel nous appelons sera une première étape en vue d’atteindre ces objectifs. »

http://www.altersummit.eu/Appel-a-un-sommet-alternatif.html