Parmi les nombreux enjeux éducatifs du congrès, les débats sur l’organisation du parcours scolaire se sont essentiellement concentrés sur l’organisation du lycée avec les trois voies du pré-bac ainsi que sur les formations de l’enseignement supérieur en lycée et plus particulièrement des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE). Cette dernière question, peu évoquée dans les textes initiaux, a en effet été portée dans plusieurs congrès départementaux.
La question de la structuration du lycée puis de l’enseignement supérieur est un sujet central qui pose en parallèle la question de la reproduction des inégalités sociales. En effet, si la quasi-totalité d’une classe d’âge passe par le collège, ce n’est pas le cas au lycée puisque près de 15 % des élèves de 3^e^ (générale ou Segpa) ne s’orientent ni vers la classe de 2de générale ou technologique ni vers une formation professionnelle sous statut scolaire. Au fur et à mesure du lycée, le tri s’accentue avec la différenciation entre les trois voies ou par les choix des spécialités au sein de la voie générale. Un chiffre, rappelé pendant le congrès, symbolise cela : la part des enfants d’enseignant·es en 1^re^ générale est 6 fois plus importante qu’en 1^re^ professionnelle.
La volonté de lutter contre les déterminismes sociaux, raciaux et de genre dans l’école fait accord et était présente dans les textes de congrès, mais, pour UA, cela passe par des passerelles entre les voies de formation et un travail d’orientation. Or, cela ne peut être suffisant et il semble évident qu’il y a derrière ce discours des réflexes corporatistes de défense des spécificités de la voie technologique et professionnelle. Les interventions du Snuep l’ont clairement dit. Pour l’ÉÉ, ce réflexe est une erreur, même dans la volonté de défendre les enseignements technologiques et professionnels, car il les enferme dans une logique de mise à l’écart et de préparation à l’employabilité de la jeunesse. Nous défendons l’idée que l’unification du système scolaire doit désormais connaître une nouvelle phase, dans la perspective de la création d’un nouveau lycée, dépassant les trois voies actuelles et mettant fin aux hiérarchies des savoirs.
La même logique corporatiste a prévalu dans la défense des CPGE et en particulier de celles dites de proximité ou post voie technologique. Inverser le discours de démocratisation nécessaire de ces formations pour le remplacer par l’idée que l’élargissement des CPGE serait un facteur de démocratisation de l’enseignement supérieur ne s’appuie pourtant sur aucune étude sérieuse. Même s’il n’est pas possible de comparer les CPGE des grands lycées de centre-ville avec les autres, parfois en réelle difficulté et accueillant un public plus diversifié, les CPGE restent des filières ultra-sélectives, où après un léger mieux jusqu’au début des années 2000, la part des enfants de cadres ne cesse de progresser (53 % à la rentrée 2023) et celle des filles de diminuer. L’écart du coût de formation avec l’université s’accroît également dans un contexte de baisse des crédits de financement de l’enseignement supérieur.
L’accroissement des inégalités au lycée et dans le supérieur impose ainsi de repenser l’organisation de l’ensemble du système éducatif à ces niveaux et de convaincre de la nécessité d’unifier les parcours et de mettre fin aux filières d’élite.
Mary David et Olivier Thiébault