PPCR, brun ou grains à moudre ?

Fin 2013, le rapport Pêcheur sur la Fonction Publique était remis au Premier Ministre, base de la réflexion et de la négociation engagées depuis avec les organisations syndicales sur l’« Avenir de la Fonction Publique ».

Dans le contexte de crise économique et sociale que l’on connaît, alors que les politiques d’austérité menées par le gouvernement se traduisent sur le terrain par une réduction drastique du nombre d’emplois publics et le maintien du gel du point d’indice depuis 2010, on pouvait être dubitatifs sur le contenu et le résultat à attendre de telles discussions.

Ouvert en avril 2014, le chantier n’est à l’heure actuelle pas abouti.
L’engagement des organisations syndicales sur la signature d’un accord-cadre est attendu pour septembre 2015.

**Du discours… à la méthode

Le 7 avril 2014, Marylise Lebranchu, ministre de la Fonction publique, ouvrait les négociations PPCR (parcours professionnels, carrières, rémunérations) en se fixant un objectif (l’amélioration de la situation des agents) et trois priorités : la réforme de l’architecture statutaire, celle des rémunérations et la simplification de la gestion des agents.

Les concertations, réparties autour de 5 séquences, ont abordé les thématiques suivantes :

✓ rénover et simplifier l’architecture statutaire,

✓ améliorer la gestion des emplois,

✓ simplifier les règles et dispositifs des agents,

✓ rénover les grilles,

✓ conclure la négociation et définir un accord-cadre sur les rémunérations et la politique salariale.

Plus d’un an après le début des discussions, le chemin parcouru entre le discours d’ouverture et les propositions, pour l’instant à l’état de projet, du gouvernement n’est évidemment pas à la hauteur des attentes, dans un contexte de blocage de la situation salariale depuis 5 années.

Opacité et transparence ? Durant de longs mois, les services du ministère ont questionné les OS sur tel ou tel sujet :

✓ Faut-il exiger un diplôme pour se présenter aux concours externes ?

✓ La suppression des niveaux hiérarchiques est-elle envisageable ?

✓ Comment concilier la poursuite du processus de fusion des corps et le maintien des identités professionnelles ?

✓ Comment la valeur professionnelle doit-elle être prise en compte dans la carrière ?

✓ Les leviers indemnitaires sont-ils pertinents pour développer l’attractivité de certains territoires ?

Ont été abordées : gestion prévisionnelle des emplois, nombre de grade, avancement de grade, avancement d’échelon, mobilité et affectation, rôle des CAP dans la gestion de la carrière des agents, lignes directrices de gestion, reconnaissance et prise en compte du mérite, développement du GRAF,…

Cela a été l’occasion pour la FSU de rappeler un certain nombre de ses revendications et de ses mandats.

Pour autant, alors que les séquences sur ces différents sujets sont terminées depuis longtemps, le ministère n’a toujours pas fait état de ses propositions et orientations. Le projet global de protocole ne sera évoqué que lors de la séance conclusive du 9 juillet. Le flou demeure.

Et quand il y a du flou…

Les seuls éléments concrets dont ont eu connaissance les organisations syndicales concernent un premier projet de reconstruction des grilles indiciaires au mois de mai.

Quelques indemnités (trop peu) transformées en point d’indice par ci, une proposition nouvelle de grille indiciaire (insatisfaisante) par là, le tout étalé dans un calendrier étalé de 2017 à 2022, la potion ne passe pas !

Surtout quand le nouveau projet d’avancement d’échelon, moins avantageux que le précédent pour les fonctionnaires, en remet une couche en terme de « valeur professionnelle » et de méritocratie.

Le ministère aura réussi le tour de force de se mettre à dos l’ensemble des organisations syndicales qui ont refusé les propositions faites.

Du coup, le 16 juin, de nouvelles mesures ont été mises sur la table :

✓ un calendrier d’application plus resserré, se terminant en 2020 au lieu de 2022,

✓ le maintien de la transformation de primes en points d’indices, dispositif étalé sur deux ans en 2017 et 2018 (9 points pour les catégories A, 6 pour les B, 4 pour les C),

✓ des mesures spécifiques pour chaque catégorie en terme de points d’indices supplémentaires,

✓ l’affirmation du principe que chaque agent a vocation à être promu à au moins un grade supérieur au cours de sa carrière,

✓ le tout dans un contexte de rallongement des carrières

Elles sont accompagnées de la promesse d’un rendez-vous salarial en 2016 qui pourrait, entre autre, porter sur la valeur du point d’indice.

Pour l’instant, le gouvernement exclut de le dégeler et lie l’affaire à une reprise de la croissance. Ce rendez vous annoncé doit être transformé pour discuter de l’ampleur du dégel et de sa rapide traduction pour les personnels.

Si la question des rémunérations semble centrale et essentielle dans cette négociation, il ne faut cependant pas l’apprécier sans l’enrobage des premières séquences sur les questions statutaires, de management et de mobilité dont les conséquences pourraient être d’importance pour chaque agent-e.

Le dossier est certes complexe, les enjeux le sont également. Cette négociation peut être considérée comme inédite depuis les réformes des années 80.

Il est d’autant plus important que les personnels puissent s’en emparer et donner leur avis.

La FSU a fait un choix positif, celui de rendre public les éléments du débats en mettant en ligne les différents documents ministériels et en jouant la transparence sur les enjeux et les avancées du débat.

La ministre a conclu la réunion du 16 mai en affirmant sa volonté d’aboutir à un accord majoritaire. Par chantage, si ce n’était pas le cas, le gouvernement retirerait ses propositions.

Les deux mois d’été permettront à chacun de digérer l’ensemble des propositions qui sont sur la table… et surtout donneront le temps, espérons-le, à la FSU de mettre en place l’information et la consultation des personnels qu’elle représente.

Ils sont les premiers concernés, ils seront les plus à même de juger de l’appréciation à porter au final par la fédération.. ●

Judith Fouillard