L’INRP mis à mort !

Lointain héritier du Musée pédagogique fondé par J. Ferry en 1879, qui constitue le fonds historique de sa bibliothèque (à Lyon) et du Musée national de l’Éducation (à Rouen), l’Institut national de recherche pédagogique (INRP) est l’héritier plus direct de l’Institut pédagogique national créé en 1956, transformé en Institut national de recherche et de documentation pédagogique en 1970, avant d’être scindé en deux établissements distincts (CNDP et INRP) en 1976.

L’histoire de la recherche en éducation est intimement nouée à la massification scolaire engagée dans l’après-guerre puis systématisée, par le fait, au début des années 1960, avec l’allongement de la scolarité obligatoire à 16 ans, la création de la carte scolaire et l’unification de « l’école moyenne » (création des collèges). Ce lien s’explicite dans ce qui est l’une des originalités de l’INRP : une activité de recherche associant enseignants, formateurs (1er et 2nd degré) et universitaires.
Principalement localisé à Lyon, mais avec des sites en Île-de-France, à Marseille et Rouen, l’INRP est chargé (art. D.314-25 du Code de l’éducation) d’une mission de recherche en éducation concernant tous les niveaux d’enseignement, en formation initiale et continue, portant sur les méthodes éducatives en liaison avec les IUFM, d’une mission de diffusion des résultats de recherche, de signalement de thèmes prioritaires ou émergents, de conservation et de développement de la documentation.
L’INRP ne répond pas complètement à l’ensemble de ses missions, en particulier depuis sa délocalisation définitive à Lyon (2005), du fait d’un « pilotage » incohérent, marqué par une absence de politique claire (ou une claire absence de politique) de la part de ses tutelles ministérielles. La valse des directeurs de l’établissement depuis 30 ans est à cet égard révélatrice d’une « autonomie contrainte », devenue entretemps la règle dans l’Enseignement supérieur et la Recherche (ESR) avec la loi LRU.
En écho à la disparition programmée des IUFM, ces tutelles (EN & ESR) ont décidé la liquidation définitive de l’INRP en l’intégrant à la récente ENS de Lyon (ENSL) à compter du 1er janvier 2011. Cette (dés)intégration aura pour conséquence de supprimer sa (relative) autonomie, scientifique comme budgétaire. En dépit des discours convenus en pareille circonstance, le flou persiste quant à ses modalités concrètes. On ignore ce qu’il adviendra de l’originalité du dispositif et du potentiel de recherche de l’INRP, que l’on dit vouloir préserver jusqu’en 2013, dans un contexte de rationalisation (marchande) du service public. Rien n’assure que les personnels détachés (enseignants) seront maintenus dans le nouvel INRP, ni que l’affectation des personnels BIATOS ne sera pas forcée.
Cette « fusion-acquisition » s’inscrit dans le processus, entamé en 2000 et toujours maintenu depuis lors, de restructuration industrielle de l’ESR, sous couvert d’harmonisation européenne (« processus de Bologne »), contre le service public. Nonobstant cette dimension politique, essentielle, demeure aussi l’exigence, pour le mouvement syndical et la FSU en particulier, de se ressaisir de la problématique de la recherche en éducation, tant son objet est spécifique. Recherche fortement contextualisée, elle réclame des moyens et aussi de l’inventivité, de la réflexion en somme, à quoi le mouvement syndical doit pouvoir apporter sa contribution, au-delà des corporatismes et des fausses certitudes. (Un blog à consulter : [http://sauvonslinrp.blogspot.com
Un appel à signer : http://www.sauvonslarecherche.fr/spip.php?article3245
Un texte à (re)lire : Antoine Prost, Pour un programme stratégique de recherche en éducation : rapport aux ministres de l’Éducation nationale et de la Recherche. Paris, La Documentation française, 2002.)]

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