La récession est là

L’année 2012 commence par… une récession ! Officiellement, la France connaîtra une « croissance négative » pour ce premier trimestre
de l’année. L’année 2011 s’est terminée de la même façon. Deux trimestres
de suite de baisse du PIB, c’est la définition légale de la récession…

Cette annonce de l’INSEE est passée un peu inaperçue. Aucun commentaire des candidats à la présidence. Le Président de la République, candidat en campagne, poursuit résolument dans la voie de la politique d’austérité. Sa proposition de « TVA sociale » est dirigée contre le financement de la protection sociale et vise, une fois encore, à alléger le coût du travail en supprimant les charges sociales, soit la partie socialisée, redistribuée du salaire. Une manière d’approfondir la récession. Le pouvoir d’achat baissera en même temps que les droits fondamentaux – à la santé notamment – seront fortement ébranlés.

La conséquence de cette politique est connue : une profonde récession avec son cortège de fermetures d’entreprises, de suppressions d’emplois, de licenciements et, par-là même, la montée du chômage. L’angoisse sociale s’étend, ouvrant la porte aux thèmes du Front national.

Cette récession pourrait se transformer en dépression par la conjonction de cette crise avec la crise financière qui, paradoxalement, vient justifier les mesures d’austérité.

La crise financière s’étend

En août 2011, le monde capitaliste rentre de nouveau dans la crise financière. L’épicentre se trouve désormais dans la zone euro. C’est la plus faible parce que, politiquement, la moins organisée. La monnaie unique s’est mise en place sans Etat, sans aucune construction de type étatique. La BCE – Banque Centrale Européenne – a été définie comme indépendante de toute structure politique, donc sans lien avec la politique des Etats, qu’elle soit budgétaire ou fiscale. Elle a souvent outrepassé ses domaines, exigeant la baisse du coût du travail pour soi-disant lutter contre l’inflation. Depuis les débuts de cette crise systémique du capitalisme, elle a rempli un nouveau rôle, celle de pompier des grandes banques pour éviter la faillite individuelle. Après la faillite de Lehman Brothers, le 15 septembre 2008, son action a été relayée par les Etats-Nations pour sauver chaque banquier et chaque assureur, chaque capitaliste national.
Le repli nationaliste a commencé à ce moment là. Sur le terrain financier, les dettes publiques ont grossi hors de toute proportion, prenant la place des dettes privées. Le sauvetage des grandes banques explique, pour une large part, la croissance de la dette publique.

Dans un premier temps, cette politique a semblé fonctionner. Le spectre d’une faillite simultanée des grandes banques s’est éloignée. Mais c’était reculer pour mieux sauter.

L’exemple de Dexia

Faute d’une transformation des règles et d’une lutte contre la cause principale de la crise, à savoir la solvabilité générale de l’économie (des ménages comme des entreprises), la réplique de la crise était programmée et sur une plus grande échelle. La faillite récente de Dexia en a apporté la démonstration. Les aides des Etats – belge, français et luxembourgeois – ont colmaté les brèches en 2008 permettant de différer la faillite. Ces Etats ne sont pas intervenus pour changer l’orientation de la banque, pour peser sur ses choix laissant l’ancienne direction libre de poursuivre dans la voie sans issue qui était la sienne : s’internationaliser à toute force. La crise financière mondiale l’a rattrapée. Une faillite classique : perte de confiance des déposants, retraits massifs… Il est question désormais de la nationaliser puisqu’une grande partie de ses activités était tournée vers les prêts aux collectivités territoriales, en Belgique et en France. Elle est aussi à l’origine de ces prêts « toxiques » indexés sur les cours des matières premières ou d’autres se traduisant par l’impossibilité de ces collectivités à faire face au service de leur dette.
La faillite des banques est inscrite dans le paysage actuel. A la Bourse de Paris, Société Générale et Crédit Agricole ont perdu de 50 à 60 % de leur valeur. La perspective de la nationalisation est défendue par de plus en plus d’économistes et pas seulement à gauche. Une politique préventive.

Aujourd’hui, il n’est plus possible de « sauver » chaque banquier. Dexia coûtera de l’ordre de 3 milliards d’euros au seul gouvernement français. Encore plus au gouvernement belge. Il serait plus simple de la nationaliser par partie… D’autant que les trois gouvernements ont été obligés de garantir toutes les opérations de la banque. La nationalisation permettrait d’éviter la faillite, mais ne serait pas suffisante…

Si faillite il y avait, le monde (et pas seulement la zone euro menacée d’éclatement) vivrait une crise profonde… Du type de celle des années 30… ●

Nicolas Bénies